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carte
Notre périple Atlantique


DE LA COROGNE A VILAMOURA

Escales en Galice et au Portugal
Novembre 1998



Fin août 98, nous avons entrepris une croisière d’un an, à bord de notre FEELING 1090 MILLIVORE, au départ de la Trinité sur mer, vers les Antilles et la côte est des USA, par la route des alizés. L’équipage se compose de Patrick, Françoise et du chien Sweet. Nous avons commencé classiquement par faire escale  en Galice, puis le long des côtes portugaises, jusqu’à Vilamoura en Algavre (sud du Portugal), avant de traverser vers Madère.
Ce document présente nos remarques sur nos différentes escales.


LA COROGNE
Nous y sommes allés presque tous les ans depuis 1991, et rien n’a beaucoup évolué.
On peut :
Soit aller aux pontons, vétustes et branlants, amarrage à pendille, eau et électricité,
Soit prendre un corps-mort,
Soit mouiller sur ancre.
Les pontons sont protégés par une sorte de brise-lame flottant, mais ça doit rester houleux par fort vent de sud-est, car il y a plus d’un mille de fetch. L’abri est bon pour les vents dominants de sud-ouest à nord-est, par le nord.
Au mouillage et sur corps-mort, on est soumis au sillage des nombreux bateaux qui entrent et sortent du port à grande vitesse, mais ce n’est pas bien méchant. Ca devient rigolo quand le sillage arrive au moment de monter ou descendre dans l’annexe...
Une petite remarque : les pontons et les corps morts sont gérés par deux organismes différents :  Le Real Club Nautico, et le Sporting Club Casino. Ce dernier est sensiblement plus cher, sans que le service apporté ne semble le justifier. Quand on prend une bouée de corps mort, rien n’indique à qui elle appartient, et on a la surprise au moment de payer !
Le mouillage sur ancre a l’avantage d’être gratuit, mais il y a 12 à 15m de fond. Il ne faut pas lésiner sur la ligne de mouillage, car le vent peut se lever très vite, et souffler très fort. Le fond est de vase dure, avec beaucoup de détritus. En 1997, en plus des 10m de câblot, des 35m de chaîne de 10, et de l’ancre de 18kg, nous avons remonté un gros bloc de bois bardé de pièces métalliques, et une grosse barre de ferraille d’au moins 2m : il nous a fallu deux heures pour relever le mouillage !
Gasoil au ponton, mais il ne reste pas beaucoup d’eau à marée basse.
Il y a quelques années, on pouvait acheter les cartes marines à la Comandancia de la Marina. Ce n’est plus le cas désormais, mais une petite librairie a pris le relais, 28-30 rue Fernandez Latorre (se procurer un plan de la ville à l’office du tourisme, sur le port).
Il doit y avoir un shipchandler, car plusieurs documents en parlent, mais il est assez discret car nous ne l’avons jamais vu ! Il est vrai que nous ne l’avons jamais cherché... 
La ville est agréable, et on peut faire de belles balades à pied vers la Torre de Hercules. Nous aimons beaucoup cette escale, où nous retournons régulièrement.

La Corogne  -  Vers la tour Hercule
La Corogne  -  Vers la tour hercule

FONTAN
A quelques milles de La Corogne, dans la ria de Betanzos, se trouve le port de pêche de Fontan, où rien n’était fait pour les plaisanciers jusqu’à récemment. Mais un voisin-bateau nous a dit qu’il y avait maintenant une marina moderne et bien équipée. Nous n’en savons pas plus... 


CAMARINAS
Très belle escale, dans une ria presque complètement fermée. Très bon abri en cas de coup de vent, et ce n’est pas du luxe ! On est tout proche du cap Finisterre, à l’angle nord-ouest de la péninsule ibérique, et la côte élevée provoque une accélération des vents de sud-ouest (dépression approchant de la Bretagne) ou de nord-est (anticyclone sur la Bretagne et dépression thermique sur l’Espagne, classique en été). Il est fréquent d’avoir force 7 à 8 pendant plusieurs jours d’affilée...
Il ne faut quand même pas généraliser : on peut aussi y trouver du petit temps, et même du calme plat.
Petite marina dans le port, avec pontons à pendilles, et petit Yacht Club sympathique. Eau et électricité mais pas de gasoil : les pompes délivrent du gasoil détaxé réservé aux pêcheurs.
Ressources de base en ville.
Jolies balades vers le cap Villano, où on trouve un parc d’éoliennes (comme par hasard...), et un phare planté sur un rocher escarpé.
Ce n’est pas le seul abri de la ria. On peut mouiller sur ancre sur différentes plages, selon le vent, dans de très beaux paysages sauvages : collines boisées plongeant vers la mer, petites plages de sable désertes, et surtout aucune construction : les promoteurs immobiliers n’ont pas encore découvert cet endroit, pourvu que ça dure !
Attention à la houle de nord-ouest, qui peut sévir même par beau temps, et qui rend les mouillages du sud inconfortables.


RIA DE FINISTERRE
Juste quelques lignes pour signaler le très joli mouillage dans l’anse de Sardineiro, sur la plage la plus à l’est. Très bon abri par vent d’ouest à est par le nord. En 1997, nous y sommes allés par force 7 à 8 de nord-est, au point de ne pas oser descendre sur la plage en annexe : en cas de panne du petit hors-bord, je n’aurai pas étalé le vent aux avirons ! Mais nous étions parfaitement en sécurité à bord. Sweet a dû attendre que le vent mollisse dans la soirée pour sa promenade quotidienne.

                                   
MUROS
Nous n’y nous sommes pas arrêtés cette année. En 1997 nous n’avons pas observé de changement particuliers.
La ville est jolie, l’escale sympathique. On mouille sur ancre au nord du port. Là aussi il y a beaucoup d’eau (plus de 10m), et des débris au fond, tout prêts à retenir votre ancre. Par vent fort de nord-est (voir Camarinas et Finisterre), il y a près d’un mille de fetch, et le clapot est réfléchi sans être atténué par le grand mur vertical qui longe le mouillage. Résultat : un clapot désordonné monstrueux. Rien de bien dangereux, mais fesses mouillées garanties si on descend à terre en annexe.
Pour éviter ça, en 1997, nous sommes allés mouiller à quelques milles de là, dans l’anse de Bornalle.

Au temps de la marine à voile, un grand voilier quitte Valparaiso, au Chili, et fait voile vers l’Europe par la route du cap Horn. Le temps reste couvert depuis le départ, impossible de faire un point précis. Après plusieurs jours de mer, le capitaine estime avoir atteint la latitude du Horn, et fait mettre le cap à l’est. En pleine nuit, le bateau file grand largue en pleine tempête, sans aucune visibilité. Tout à coup, le vent tombe brutalement à zéro, et la mer se calme quasi instantanément. Le bateau avance encore quelques centaines de mètres sur son erre, et s’arrête, voiles pendantes, sur une mer plate comme un lac. L’obscurité est profonde, aucune lueur, aucun bruit... Le capitaine fait sonder, mais on ne trouve pas le fond. L’équipage commence à
angoisser sérieusement, certains se demandant s’ils ne sont pas tous morts !...
Finalement le jour se lève, qui apporte l’explication, et une grosse frayeur rétrospective : le bateau avait pénétré par hasard dans une ria profonde, dans laquelle le vent n’entrait pas, et où la mer restait parfaitement calme.
Incroyable, non ? L’histoire est pourtant authentique.

Et bien, nous avons observé plusieurs fois ce phénomène dans les rias de Galice (notamment Muros et Pontevedra) :
Le vent est frais, 5 à 6 de secteur nord. Vous approchez de l’entrée de la ria sous voilure réduite, cirés et grosses vestes de quart. En approchant, l’état de la mer dans la ria vous paraît un peu bizarre... Tout à coup, en moins de 100 mètres, le vent tombe à zéro, et vous vous retrouvez sur un lac ! Il n’y a plus qu’à finir la route au moteur ! Vous avez une pensée émue pour l’équipage du bateau que vous croisez, et qui sort lui aussi au moteur : à bord, ils sont tous en maillots de bain, et vont bientôt avoir une surprise !
Je pense que le phénomène est dû à ce que les météos appellent une “inversion de température”: une masse d’air froid et stable reste coincée dans la ria, et le vent plus chaud glisse au dessus, sans se mélanger avec cette masse d’air plus dense.
 

BAYONA
Vraie marina, bon abri, dans un joli site. Un peu trop connu : le port est souvent plein. Cette année, nous y sommes arrivés à minuit dix, le 15 septembre (à éviter : l’alignement d’entrée est quasiment invisible du large, et il y a des cailloux partout !). Plus de place aux pontons, mais un
gars du port nous a guidés jusqu’à un corps mort. On peut aussi mouiller sur ancre, gratuitement.
C’est une escale très agréable, avec de belles balades à faire à pied autour du château.


VIANA DO CASTELLO
Premier port portugais, et accueil mémorable : après une traversée tranquille depuis Bayona, par force 5 de nord, le vent a brusquement fraîchi à plus de 35 noeuds, à un mille de l’arrivée : entrée dans le port et affalage sportifs !
Il doit y avoir un phénomène local d’accélération du vent, lié à l’estuaire du rio Lima et à la colline qui domine la ville. A un mille en amont du port de commerce, se trouve une petite marina très sympathique, juste avant un pont routier et ferroviaire signé Gustave Eiffel. Pontons à pendilles, eau, électricité, et gasoil au ponton.

Le douanier est là avant même que le bateau soit amarré, ce que nous verrons souvent au Portugal. Ca peut paraître agaçant, mais il faut le voir du bon côté : ils donnent parfois un coup de main (attention, le noeud de chaise ne fait pas partie de la formation des douaniers portugais...), tous baragouinent au moins le français ou l’anglais, et ils sont prêts à nous expliquer où se trouve le bureau du port, voire la boulangerie et le supermarché. Leur boulot consiste à remplir un formulaire, et ils demandent pour ça les papiers du bateau et de l’équipage. Tout se règle en moins de 10 minutes. Aucun douanier portugais ne nous a demandé la quantité de tabac, d’alcool ou de cocaïne que nous avions à bord...

Mais revenons à Viana. Le pont n’est pas très gênant : seuls les trains font du bruit, et le trafic est faible, voire inexistant la nuit. Le site de la marina est agréable, avec un jardin public qui longe le quai. La ville est très belle, rues piétonnes pavées, maisons et églises aux façades sculptées, fontaines... On y trouve un grand marché couvert quotidien, et un supermarché “Pingo Doce”, ouvert tous les jours.
Ne manquez pas de monter à l’église de Santa Luzia, qui domine la ville (par le funiculaire, c’est plus amusant et moins fatiguant !). On y a une superbe vue sur la ville, le port, la rivière...
Cette escale sympathique semble très peu fréquentée : nous y sommes restés trois jours, et nous étions le seul bateau en escale...

Viana do castello
Viana do Castello, vue depuis Santa Luzia

LEIXOES

Changement d’ambiance, par rapport à Viana do Castello : ici, la marina est au fond du port de commerce, et l’environnement est sinistre : béton et ferrailles, gris et triste, pas un arbre ni un brin d’herbe à plusieurs centaines de mètres à la ronde. Il y a quand même une plage pas très loin. A part ça, la marina est bien organisée, pontons à catways, gasoil au ponton... Il faut aller jusqu’au centre ville pour trouver des commerces.
L’abri est bon, mais on est soumis aux sillages des “pilotos”, qui considèrent que la limitation de vitesse à 3 noeuds dans le port ne les concerne pas. Seuls intérêts de cette escale : abri en cas de mauvais temps, et proximité de Porto, dont le port n’est pas toujours accessible.



FIGUERA DA FOZ
Marina récente, dans un bassin au nord du rio Mondego, à l’abri du courant. Nous sommes accueillis par un douanier volubile et très sympathique, parlant français, qui nous a fourni toutes les infos utiles dans la bonne humeur. Pontons à catways, eau et électricité, mais pas de gasoil.
Le site de la marina est complètement fermé, on pénètre dans l’enceinte en tapant un code sur un clavier. Le bureau du port et les sanitaires sont encore dans des bâtiments préfabriqués, mais ça devrait évoluer dans l’avenir. Nous sommes tout près du centre ville, avec tous les
commerces, y compris le supermarché Pingo Doce, et la plage est proche. Nous y rencontrons plusieurs bateaux français, avec lesquels nous  sympathisons, et nous passons là une très agréable escale.

Attention, quelques jours après, les AVURNAV diffusés par le NAVTEX de Lisbonne ont annoncé que l’accès du port était interdit, pendant plusieurs jours de suite. La raison n’était pas indiquée. Nous ignorons si ça se produit souvent, mais ça peut poser problème car Leixoes est à plus de 60 milles au nord, et Nazaré à plus de 35 milles au sud, et il n’y a aucun autre abri entre les deux.
 

NAZARE
Toute petite marina très bien abritée, au fond d’un port de pêche, avec pontons à catways. Pas de panique si votre sondeur perd le fond juste au moment d’entrer dans le port : un canyon sous-marin très profond s’approche tout près du rivage.
La marina est fermée, on y accède avec une carte magnétique. L’ambiance est assez triste, mais ça va peut-être s’améliorer : un bâtiment récent regroupe le bureau du port, la douane, les sanitaires et un petit commerce, mais il est pour l’instant planté au milieu d’un grand terrain vague. Accueil sympathique du directeur de la marina, qui nous a apporté toute l’aide voulue, de l’amarrage du bateau aux infos sur les ports de Lisbonne.
La ville est loin, il faut prendre un bus pour y aller. Par contre, la criée est à proximité, et mérite bien son nom : réveil garanti au milieu de la nuit !


PENICHE
Petite marina, perdue dans un immense port de pêche. On s’amarre, sous l’oeil patient du douanier,  le long d’un grand ponton, de préférence à l’intérieur, car à l’extérieur on est soumis au sillages des nombreux bateaux de pêche, qui ne connaissent pas eux non plus la limitation de vitesse à 3 noeuds. La marina est là aussi fermée, on y entre avec une carte magnétique (même système qu’à Nazaré). La ville est proche, avec tous les commerces courants, y compris le Pingo Doce.
Pour avoir du gasoil, c’est du sport ! Un gars du club nautique local va en chercher à la station service du pays, dans un fût de 200 litres posé sur une remorque, derrière une voiture. Il faut ensuite amener le bateau à quai, où le transvasement à lieu. Ce service est évidemment payant. Nous avons renoncé à l’opération (nous avions largement de quoi atteindre Lisbonne), mais des amis-bateau ont préféré aller bidonner à la station service en taxi : pour deux aller-retours, ils ont payé moins cher.
Lors de notre deuxième nuit à Peniche, la brume est tombée vers 4 heures du matin. La corne de brume du port est une sirène, genre sirène d’incendie, qui se met en route toutes les deux minutes. Sûrement très efficace pour signaler l’entrée du port, mais aussi pour vous empêcher de dormir ! Nous nous sommes enfuis dès 7h30 du matin.


LISBONNE
L’arrivée à Lisbonne commence par la très jolie remontée du Tage. Le trafic marchand est important mais il y a de la place pour tout le monde. Attention cependant à certaines barques de pêche qui laissent traîner de très longs cordages juste sous la surface. Le  courant peut être important : nous avons remonté le fleuve à la voile à plus de 8 noeuds sur le fond !
Après être passée devant la tour de Belem et le monument des découvertes (n’oubliez pas de sortir l’appareil photo !), on passe sous un immense pont suspendu. Pas de problème de tirant d’air, nous sommes passés juste derrière un grand trois-mâts, qui se rendait à l’expo universelle. Sur certaines files de circulation de ce pont, les voitures roulent sur une sorte de grille métallique. C’est amusant, car on les voit par transparence quand on passe dessous, mais beaucoup moins amusant si on séjourne à proximité, car le bruit est infernal. On peut espérer que c’est une situation provisoire, car le pont était en travaux durant notre séjour.
Désormais, les bateaux de passage séjournent à la marina de Alcantara, au fond d’un immense bassin de commerce. Pontons à pendilles, bureau du port et sanitaires provisoires, en préfabriqués.
Nous n’avons pas vu de douanier (incroyable mais vrai !), mais un ami-bateau français, EDELWEISS, arrivant vers deux heures du matin s’est fait arraisonner par une vedette des douanes en remontant le fleuve...
Le site de la marina est là aussi fermé, on y pénètre grâce à un code (curieusement, le code est différent pour chaque bateau). L’abri est parfait, mais l’environnement n’est pas folichon. On se console en se disant qu’on n’est pas venu pour se promener dans la verdure, mais pour visiter Lisbonne, et à ce point de vue, on est plutôt bien placé : On est à 3km du centre-ville, et si ça vous semble encore trop pour marcher, un train de banlieue vous y mène pour une somme modique. Ne ratez pas le joli musée de la marine, à Belem (en prenant le train dans l’autre sens).
Pas de problème de ravitaillement, le Pingo Doce est à proximité du port. On trouve un petit shipchandler à la marina voisine, juste sous le pont.
On a l’eau et l’électricité au ponton, mais pour le gasoil, il faut aller à la marina de Belem. Le ponton à carburant est assez curieux : une rambarde nous empêche de tomber à l’eau, mais complique quelque peu le débarquement et l’amarrage du bateau. Attention, il ne reste pas beaucoup d’eau à marée basse.

Lisbone  -  Monument des découvertes
 Lisbone  -  Monument des découvertes

SESIMBRA
Un joli port de pêche, à l’ouest de Setubal. Aucune infrastructure pour la plaisance, mais il y a suffisamment de place pour s’amarrer le long de deux appontements, ou à couple des bateaux locaux. Nous avons préféré mouiller sur ancre devant la petite plage au fond du port. Nous ne sommes restés qu’une nuit, et nous n’avons pas exploré le village, qui semble assez joli, avec son château sur la colline.


SINES
Ce port a mauvaise réputation, depuis l’installation d’un terminal pétrolier. Effectivement, quand on entre, ça n’a pas l’air bien gai : terminal pétrolier à
gauche, port de commerce à droite...
Nous continuons jusqu’à franchir les deux jetées de l’ancien port de pêche, et là, on change d’univers !
A gauche, un petit port de pêche plein d’embarcations multicolores, A droite, une petite marina avec pontons à catways, Au fond, une belle plage de sable clair, où l’on peut mouiller si nécessaire, et dominant tout ça, un sympathique village sur la colline, avec une citadelle au style mauresque, et plein de palmiers et de cactus. C’est clair, on arrive dans le sud !
Ajoutez à ça que l’abri est excellent (ce petit port est protégé extérieurement, par les grandes jetées des ports commerciaux), et que l’accueil du personnel de la marina est très chaleureux, et vous obtenez une très agréable escale. Et en plus ce n’est pas cher (mais nous étions hors saison), et l’utilisation du lave-linge et du sèche-linge est gratuite...

La plage de Sines
La plage de Sines

BALEEIRA

Premier port après le cap Sao Vincente. Nous sommes maintenant sur la côte sud du Portugal, changement spectaculaire : il n’y a plus de houle, et les vents dominants étant de secteur nord, la mer est plate.
Baleeira est un petit port de pêche et aucune infrastructure n’est prévue pour la plaisance. Nous avons mouillé sur ancre dans le port, parfaitement abrités du vent de nord, dans un site pittoresque. Attention, le fond semble rocheux, la tenue de l’ancre est probablement aléatoire ainsi que sa remontée... La plage au fond du port est assez sale. Une grande plage plus au nord semble plus accueillante, mais les fonds sont faibles, ce qui oblige à mouiller très loin du rivage.
Nous ne sommes restés qu’une nuit, et n’avons pas exploré la ville.

Cap Sao Vincente
Cap Sao Vincente - Pointe sud-ouest du Portugal


VILAMOURA

Nous avons traversé directement de Baleeira vers Vilamoura, pour revenir ensuite vers Lagos avant de traverser vers Madère.
Vilamoura est une ville entièrement artificielle, uniquement conçue pour les touristes à monnaies fortes. On se croirait dans le Languedoc Roussillon, sauf qu’on y parle essentiellement allemand...
L’abri est très bon, la marina est bien organisée. Après les formalités, le bureau du port affecte une place au ponton. Nous étions le seul bateau habité sur notre ponton, et cette escale a nettement manqué de convivialité !
Le port est entièrement entouré d’hôtels et de commerces, essentiellement des bars et restaurants. On y trouve une boulangerie française, et deux crêperies bretonnes ! Le shipchandler est dans le bâtiment du bureau du port, c’est à dire très loin (200m en bateau, 2km à pied), car il faut contourner toute la marina pour y accéder.
Bref, Vilamoura peut être vue comme excellente en tant qu’escale technique (parfait abri, eau, électricité, gasoil, sanitaires, laveries, etc...), ou abominable en tant qu’escale d’agrément !
 

LAGOS
Un long chenal étroit mène à une marina moderne. Il s’agit aussi d’une station balnéaire, mais quand même bien plus agréable que Vilamoura : d’abord, le bureau du port place les bateaux de passage ensemble, ce qui est bien plus sympathique, les commerces pour touristes sont plus
discrets, et surtout, Lagos est une vraie ville, avec de vrais habitants, et de vrais commerces !
Une passerelle pour piétons enjambe le chenal juste à l’entrée du port, mais on en obtient l’ouverture à tout moment par un appel du port à la VHF. L’abri est parfait, par tous les temps.
Eau et électricité au ponton, gasoil au ponton d’accueil. La marina est là aussi fermée, on y accède à l’aide d’une sorte de clef magnétique, et les sanitaires sont somptueux, tout en marbre (c’est un cas rare). Le supermarché Pingo Doce est à proximité, et on trouve tous les commerces en ville. La ville est agréable, et on peut faire de belles balades vers la côte sud, falaises percées de nombreuses grottes. On peut également visiter cette côte spectaculaire en embarquant dans des petites barques à moteur hors-bord, partout sur le port.

A deux milles à l’est de Lagos s’ouvre une lagune formée par l’embouchure du rio Alvor, entre autres. Cette lagune était considérée jusqu’à récemment comme impropre à la navigation, mais en passant devant, nous avons observé que l’embouchure était maintenant canalisée par deux
jetées équipées chacune d’un feu. On peut donc même y entrer de nuit... Un de nos amis-bateau, VIRUS, dériveur intégral en alu est parti de Lagos pour explorer cette lagune.
Malheureusement, il continuait ensuite vers Gibraltar, et nous partions le lendemain vers Madère. Nous n’avons donc pas d’infos sur cet endroit, mais nous espérons bien revoir VIRUS en Bretagne l’année prochaine...

Quelques remarques générales pour conclure :
La Galice est une très belle zone de croisière, avec de nombreux mouillages forains, très peu fréquentée : il n’est pas rare d’être le seul bateau dans un très beau mouillage, en plein juillet (rien à voir avec la Bretagne sud !). Il faut cependant garder un oeil sur la météo, le vent peut souffler fort et la mer devient vite creuse (voir annexe météo ci-après).

Au Portugal, plus de mouillage forains (sauf sur la côte sud), il faut aller dans les ports. Les marinas sont dans l’ensemble très correctes, et toujours en cours d’amélioration. Les tarifs sont nettement moins chers qu’en France, ainsi que le coût de la vie. Pas de problème pour avoir de l’eau, un peu plus difficile pour le gasoil, dans certains ports. On trouve facilement du Camping Gaz, à des prix incroyables : 30F pour une recharge de bouteille à Lisbonne. Les voitures de locations ne sont pas chères non plus, ce qui permet d’aller visiter facilement l’intérieur. Par contre, les shipchandlers sont rares, chers et peu fournis.

C’était la première fois que nous naviguions au Portugal, et nous avons beaucoup apprécié ce pays et l’excellent accueil de ses habitants. La langue n’a jamais été un problème : bien que ne parlant pas un mot de Portugais, nous avons toujours pu nous débrouiller avec le Français et l’Anglais.

                            

ANNEXE  : Prévisions météo sur l’Espagne et le Portugal
Novembre 1998

A bord de MILLIVORE, nous ne comprenons ni l’Espagnol, ni le Portugais. Nous ne pouvons donc pas compter sur les bulletins émis par les stations côtières. Nos sources météo sont les suivantes (horaires et fréquences sous réserve de modifications):

Bulletin du CROSS Corsen, en BLU (1650kHz, répété sur 2677kHz, 6h15 et 18h15 UTC):
Assez curieusement, on ne reçoit pas à la Trinité sur Mer, mais ça s’améliore vite dès qu’on descend vers l’Espagne. Bien détaillé, avec évolution ultérieure, et répété sur une autre fréquence après la première diffusion.
On le reçoit jusqu’au nord du Portugal, mais il ne couvre malheureusement pas la zone Ouest Portugal.

NAVTEX (518kHz):
Nous n’avons pas de récepteur spécifique à bord, mais nous recevons les messages avec le récepteur BLU connecté à un PC portable. Ces messages concernent la météo et les avis urgents aux navigateurs.

Emetteur du CROSS Corsen (0h, 4h, 8h, 12h, 16h, 20h UTC) :
Réception difficile de la Trinité sur Mer, ça s’améliore dans le golfe de Gascogne. Bonne météo.

Emetteur de la Corogne (0h30, 4h30, 8h30, 12h30, 16h30, 20h30 UTC) :
Bien reçu dans le sud du golfe, mais réception difficile dans les rias de Galice. Météo un peu succincte.

Emetteur de Lisbonne (2h50, 6h50, 10h50, 14h50, 18h50, 22h50 UTC) :
Bien reçu sur toute la côte portugaise, mais plus à Madère. Bonne météo, mais parfois quelques loufoqueries : envoi pendant 10 minutes des signaux de synchronisation, sans aucun message exploitable (?)

Emetteur de Las Palmas (1h20, 5h20, 9h20, 13h20, 17h20, 21h20 UTC) :
Bien reçu à Madère et dans toutes les Canaries, mais horaires assez fantaisistes. Météo correcte.


Cartes météo envoyées par radio :
Les cartes qui nous intéressent sont les cartes isobariques de surface. On y voit la position des centres d’actions (anticyclones, dépressions...), et la direction et l’espacement des isobares nous donnent directement la direction et la vitesse du vent.
Nous n’avons pas non plus de récepteur spécifique fax à bord, mais le même récepteur BLU, toujours connecté au PC portable, nous permet de recevoir les cartes météo directement à bord. Ce service très appréciable, et gratuit, semble malheureusement en voie d’extinction : d’après la
littérature, il devait y avoir un émetteur à Madrid, mais nous n’avons jamais pu le recevoir, et un autre à Dakar, qui semble ne plus émettre que des pages blanches (?). La France avait un émetteur aux Antilles qui a cessé ses émissions il y a quelques années... Heureusement, les anglo-saxons sont fidèles au poste !

Voici les émissions qui couvrent les côtes européennes. Les horaires sont donnés en UTC, sous
réserve...

Emetteur de Bracknell (Angleterre) 2618.5kHz, 4610kHz, 8040kHz, 14436kHz, 18261kHz :
Cartes de surface T+0h à 3h41, 9h41, 15h41, 21h41
Situation générale et carte à T+24h à 10h31, 16h31 (Cette dernière est presque toujours en retard, ça doit être l’heure du thé, à Bracknell !)
Cartes de surface à T+48h et T+72h à 10h50
Très bonnes cartes de l’Atlantique nord, et Méditerranée, avec prévisions à 3 jours, malheureusement limitées vers le sud à Madère. Bien reçues jusqu’au Canaries.

Emetteur de Londres (Angleterre) 3652kHz, 4307kHz, 6452.5kHz, 8331.5kHz :
Carte de surface du jour à 15h45
Bonne carte, descendant jusqu’au sud des Canaries, mais pas de prévision à moyen terme. Réception correcte jusqu’aux Canaries.

Emetteur d’Offenbach (Allemagne) 385kHz, 7880kHz, 13882.5kHz :
Cartes de surface à T+48h, T+72h et T+96h à 8h08
Carte de surface à T+24h à 18h32
Très bonnes cartes de l’Atlantique nord et Méditerranée, avec prévisions à 4 jours, descendant normalement jusqu’au Canaries, mais un cartouche masque la zone Madère-Canaries (dommage !). Bien reçues jusqu’aux Canaries.

Je n’ai noté ici que les cartes les plus intéressantes pour nous, mais ces émetteurs envoient des cartes très diverses quasi 24h sur 24 (températures d’eau, état des glaces dans le nord, vents à différentes altitudes pour l’aviation, etc...).

Aux Canaries, nous commençons à recevoir émetteur de Boston (USA), qui transmet des cartes couvrant l’atlantique tropical. D’autres émetteurs fonctionnent aux USA (Norfolk, Miami, New Orleans...), et un peu partout ailleurs dans le monde. Nous pensons donc avoir une couverture pour toute la croisière.

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ESCALES A MADERE ET AUX CANARIES

Décembre 1998



Notre croisière à bord de MILLIVORE vers les Antilles par la route des alizés, se déroule comme prévu. Après nos escales en Galice et au Portugal, nous sommes allés visiter les archipels de Madère, puis des Canaries, en octobre et novembre 98 avant le grand saut vers les Antilles en décembre. Ce document présente nos remarques sur nos différentes escales dans ces îles ensoleillées.


PORTO SANTO
Après 3 jours de traversée depuis le Portugal, nous arrivons à Porto Santo, première île de l’archipel de Madère. L’aspect de l’île est très dépaysant, quand on arrive de Bretagne : haute pour sa taille (mais on n’a pas encore vu Madère...), et complètement désertique. Ni arbre, ni végétation, le roc est à nu. Très spectaculaire !
Pas de problème pour choisir un port : il n’y en a qu’un ! Et c’est déjà bien par rapport à ce qui suivra... La côte sud de l’île forme une grande baie, bordée d’une immense plage de sable doré. Le port est à l’est de la baie. Il est très bien protégé des vents et de la houle dominants (de nord-est), mais ouvert à l’ouest, et doit être un peu houleux par vents de ce secteur. Ca a dû arriver avant notre passage : plusieurs ex-cyclones tropicaux sont venus vers le Portugal cet automne, et ont apporté du suroît fort dans la région.

Dans le port, on a le choix :
Aller au ponton, catways avec eau et électricité, s’il reste de la place.
Mouiller sur ancre. Il y a toute la place voulue, et le fond de sable est très bon.
Ou prendre des bouées. Ce type de mouillage est assez curieux, et nous n’avions vu ça nulle part ailleurs : le bateau est maintenu par 4 amarres maillées sur des corps morts au fond, 2 à l’avant, 2 à l’arrière. Ainsi écartelé, le bateau reste parfaitement immobile, quel que soit le vent, ce qui permet d’amarrer les bateaux proches les uns des autres. La manoeuvre n’est pas simple, mais un gars très sympathique, parlant français, vient normalement donner un coup de main. Pas de chance, il n’était pas là à notre arrivée, et nous nous sommes débrouillés seuls. L’eau du port est d’une clarté incroyable, on voit distinctement le fond, même par 6 ou 7 mètres d’eau.
Le mouillage sur bouées, ainsi que sur ancre, coûte une somme modique (de l’ordre de 30F par jour pour un 11 mètres). Ceci est justifié par le service : le gars du port passe tous les jours vérifier les amarres et les lignes de mouillage. On peut vraiment laisser le bateau en sécurité à Porto Santo, et c’est un des gros avantages de ce port.

Il est aussi possible de mouiller sur ancre à l’extérieur du port, devant la plage, mais ça reste toujours un peu rouleur : la houle de nord-est est réfractée par la côte, et vient atteindre le littoral sud. Seul avantage : c’est gratuit. Ce mouillage est intenable par vents de secteur sud.

Deux organismes différents gèrent le port. L’un gère le ponton, l’autre les mouillages, et ils se font une  concurrence féroce : les employés de l’un essayent de vous dissuader d’aller chez l’autre, et inversement. Mais tout ça se fait dans la bonne humeur, et l’accueil est très sympathique.
Les formalités nécessitent le passage dans 3 bureaux (douane, immigration, et bureau du port choisi), mais tout se passe avec le sourire. Arrivés en fin d’après-midi, et ayant passé du temps à amarrer le bateau, nous n’avons pas pu tout faire le soir même. Le lendemain matin, quand le gars du port est passé nous voir sur le bateau, je lui ai dit que j’irai finir les formalités rapidement. Réponse : “T’affole pas, tu iras quand tu pourras ! On est à Porto Santo ici !”. Révélateur de l’ambiance locale !

Le village est à environ 2 km, et on y trouve toutes les ressources de base, y compris le supermarché Pingo Doce (on est toujours au Portugal !). L’île n’est pas touchée par le tourisme de masse, et le village est agréable. On profite des courses pour faire une grande balade le long de la très belle plage. Evidemment, il ne faut pas s’apercevoir au retour qu’on a oublié le pain !
Pour l’eau et le gasoil, si on est sur bouées, il faut aller s’amarrer le long d’un ponton flottant, contre le quai. Ce ponton, formé de dalles creuses en plastique est particulièrement instable : on se croirait dans “Intervilles”, et il vaut mieux y descendre en maillot de bain, au cas où !...

Malgré l’aridité ambiante, l’île mérite largement une visite. Nous avons pris un taxi, qui pour un prix très raisonnable, nous a fait faire un tour de l’île en deux heures, et nous a montré plein de jolis coins, avec commentaires en français. On est un peu surpris de trouver sur cette petite île un aéroport international, avec une piste pour gros porteurs, mais on comprend mieux quand on a vu Madère (voir plus loin)... Christophe Colomb a vécu ici, et sa maison est maintenant un musée. Ceci ne fait que confirmer l’ambiance “transat” qui règne dans le port.

Nous avons beaucoup apprécié notre escale à Porto Santo, et nous y sommes restés bien plus longtemps qu’initialement prévu. C’est une escale classique pour ceux qui partent pour les Antilles, et la plupart des bateaux peignent leur logo sur le mur de la grande jetée : n’oubliez pas de définir votre logo, et d’emporter les pots de peinture !

Porto Santo - Côte sud
La côte sud de Porto Santo

MADERE

40 milles plus loin, voici l’île de Madère, bien plus grande et plus haute que Porto Santo. Une première curiosité, en approchant de la côte est : une grosse construction, montée sur des centaines d’énormes pilotis plantés dans la mer. Il s’agit de la piste de l’aéroport ! L’île ne comporte aucune surface plane assez grande pour un aéroport, et la piste a été réalisée en partie en creusant dans la montagne, et en partie au-dessus de la mer, sur ces fameux pilotis. Ceci explique le grand aéroport de Porto Santo : pendant longtemps, c’était le seul aéroport de l’archipel, et il fallait ensuite deux heures de bateau pour rejoindre Madère.

A Madère, pas beaucoup de choix pour s’arrêter. Nous avions pensé passer une nuit au mouillage à Machico, sur la côte est, mais la grosse houle de nordet nous en a dissuadés. Seule autre possibilité : le port de Funchal, sur la côte sud. C’est un port de pêche et de commerce, directement ouvert à l’est. La houle dominante de nordet est réfractée par la côte, vire à l’est sur la côte sud, et donc entre directement dans le port, sans aucune jetée pour l’arrêter (bizarre, bizarre !). Il est vrai que nous sommes dans le dévent de l’île, et que le vent est généralement faible de secteur ouest, et que le gros mauvais temps d’hiver est aussi de secteur ouest.
Il y a une marina dans le port, très bien protégée, mais elle est pleine, du moins en cette saison. Occupée aux 9/10 par des bateaux locaux et les “promène-couillons”, il ne reste que très peu de place pour les bateaux de passage, qui sont à couple sur 5 ou 6 niveaux. Les employés du port opposent un barrage énergique à toute nouvelle entrée, et même s’il y a manifestement une place, elle est toujours réservée...
Nous nous retrouvons donc au mouillage sur ancre dans l’entrée du port, directement exposés à la houle. Autant le dire franchement, ce mouillage est in-vi-vable ! Roulis quasi permanent, jusqu’à 20̊ d’un bord et d’autre, aucun bateau, grand ou petit n’est épargné. Seuls les multicoques semblent s’en tirer un peu mieux.
Avertis du problème, nous avions essayé de réserver une place dans la marina par téléphone depuis Porto Santo. Réponse : “impossible pour les deux prochaines semaines”. Nous avons harcelé les employés du port pendant plusieurs jours consécutifs, sans résultat. Pourtant certains arrivent à entrer. Comment font-ils ? Faut-il réserver 6 mois à l’avance ? Faut-il amener le bateau en août et le laisser là jusqu’en novembre ? A qui faut-il payer le bakchich ? Nous n’avons pas la réponse.
Un ami-bateau, PEN AZEN, a trouvé une solution élégante : faisant du charter professionnel, il a reçu du courrier d’entreprise d’allure très officielle au bureau du port de Funchal. Les gens du port, le prenant probablement pour un V.I.P. n’ont pas osé le refouler. Il faut peut-être se faire envoyer un courrier de France, dans une enveloppe à en-tête de l’Elysée, et adressée à “Monsieur le ministre, à bord du bateau XXX, aux bons soins du capitaine du port de Funchal”...
Une autre solution, largement pratiquée, est de laisser le bateau à Porto Santo, et de venir à Madère par le ferry ou par l’avion. Seul inconvénient, il faut prévoir au moins une, voire deux nuits d’hôtel à Madère. La présence de notre chien Sweet ne nous a pas permis cette solution.

Mais au fait, si on est si mal reçu, faut-il vraiment venir à Madère ?
Oui, sans hésiter, il faut visiter Madère !

La ville de Funchal est jolie, une fois dépassés les bars et restaurants pour touristes qui longent le littoral. La ville s’étend au flanc de la montagne, avec plusieurs jardins à la végétation luxuriante. On y trouve toutes les ressources courantes, y compris l’inévitable Pingo Doce.
Mais surtout, il faut visiter l’intérieur. L’île est extrêmement escarpée, couverte d’une végétation luxuriante, et offre partout des paysages à couper le souffle. On y trouve tout un réseau d’aqueducs d’irrigation, les levadas, qui serpentent à flanc de montagne, et qui amènent l’eau de la face nord, très arrosée vers la face sud plus sèche. C’est le paradis des randonneurs, de tous niveaux : de la balade quasi horizontale, le long des levadas, aux randonnées vertigineuses avec des centaines de mètres de dénivelé, et toujours dans des paysages grandioses. Nous avons visité l’île en voiture de location. Le réseau routier est lui aussi impressionnant, et on y roule le plus souvent en seconde... On peut aussi circuler en car, ce qui est plus pratique pour les randonnées : un car nous amène au début du chemin, et un autre nous ramène à Funchal. Mais les chiens ne sont pas admis dans les cars, les bus, et semble-t-il même dans les taxis (mais dans ce dernier cas, on peut négocier...). Nous avons donc dû nous contenter de randonnées aller-retour sur le même chemin. Malgré tout, nous gardons un souvenir ému de notre visite de l’île d’une journée. Nous serions certainement restés plus longtemps à Madère, mais le roulis au mouillage nous a chassés au bout de 5 jours.

Madère - côte nord
La côte nord de Madère

PUERTO CALERO (LANZAROTE)
Après deux jours de traversée depuis Madère, nous arrivons sur Lanzarote, notre première escale aux Canaries. Très mauvaise visibilité, et vent frais d’est. On se croirait (presque) en Manche, seules différences : le temps est très sec, la mauvaise visibilité est importée du Sahara par le sirocco sous la forme d’une très fine poussière qui s’infiltre partout. Et il fait quand même plus chaud !

Puerto Calero est une marina moderne, bien abritée, avec pontons à catways. L’accueil n’est pas très chaleureux, ça nous change du Portugal. Nous apprenons que la marina est pleine, mais heureusement en cours d’agrandissement, et on nous propose une place sur l’un des nouveaux pontons : pour le même prix, nous aurons l’eau mais pas l’électricité, qui n’est pas encore installée.
Surprise quand nous descendons à terre : on trouve les sanitaires, un tout petit supermarché, et quelques bars et restaurants, et c’est tout. Cette marina, entièrement artificielle a été installée en plein désert. De plus, les seules cabines téléphoniques datent de Graham Bell, et n’acceptent que les pièces...
Pour retrouver la civilisation, il faut faire 3 bons kilomètres à pied sur une route poussiéreuse en terre battue. Avec le sirocco, sa poussière, et la sécheresse ambiante (PEN AZEN retrouvé là, a mesuré 17% d’humidité !), on se croirait dans un bouquin de Frison-Roche, version Sahara. Finalement, on arrive à Puerto del Carmen. C’est une ville touristique où l’on parle essentiellement allemand, mais où l’on trouve toutes les ressources de base, de vraies cabines téléphoniques, et des voitures de location...
Lanzarote elle aussi mérite une visite. L’île a subi une grosse éruption volcanique au siècle dernier, et 200 km² ont été recouverts par la lave ou les cendres volcaniques. Cette zone est maintenant un parc naturel très spectaculaire, il n’y a plus de volcans en activité, mais certains endroits sont encore très chauds, et une partie de la visite peut se faire à dos de dromadaires ! On peut aussi visiter des grottes formées par d’anciennes coulées de lave, et un très spectaculaire promontoire, le Mirador del Rio, offrant une vue magnifique sur l’île de Graciosa (attendre que le sirocco ait cessé de souffler !). Tout ceci est évidemment payant, il faut bien faire entrer les deutschmarks dans l’économie locale, mais nous n’avons pas regretté nos différentes visites.
A noter un grand shipchandler (on avait perdu l’habitude !), à Arecife, capitale de l’île.

Lanzarote - Mirador del Rio
Vue sur Graciosa depuis le Mirador del Rio

GRAN TARAJAL (FUERTEVENTURA)

Sur la côte sud de Fuerteventura, ce port se compose d’un bassin fermé, assez bien protégé. Les deux pontons, isolés dans un coin, sont occupés par les bateaux locaux, mais il y a assez de place pour mouiller sur ancre dans le port. Pour débarquer en annexe, il y a une cale, glissante comme toutes les cales, et qui manque un peu de longueur : nous étions en grande marée basse, et ce fut assez sportif, et sûrement rigolo pour les spectateurs...
Nous ne sommes restés qu’une nuit, et n’avons pas visité le village.

PUNTA JANDIA (FUERTEVENTURA)
Mouillage forain à l’extrême sud-ouest de Fuerteventura, conseillé par les guides de navigation. On mouille devant la plage d’un petit village. Le fond est rocheux, avec des zones de sable. Il faut évidemment poser l’ancre sur une zone de sable, mais c’est bien plus facile qu’on pourrait croire : l’eau est tellement claire qu’on distingue parfaitement le fond (Attention, ça ne doit pas marcher la nuit...).
Que dire de plus sur ce mouillage ?... Ah oui ! C’est un mouillage “funchalien” : extrêmement rouleur ! Nous nous sommes enfuis dès le lendemain matin !


LAS PALMAS (GRANDE CANARIE)
Un grand port de commerce, comportant une grande marina. Mais pas de place pour nous ! Les responsables du port attendent l’ARC (rallye annuel anglais), plus une autre course. Résultat : près de 200 bateaux de passage vont arriver dans les prochains jours !
Il faut déplorer la généralisation des transats organisées, telles que la transat des alizés, des passionnés, l’ARC, les îles du soleil, et j’en passe. Leurs organisateurs trustent les places de port (et parait-il aussi les chambres d’hôtel et les billets d’avions, pour les familles et équipiers...), au point qu’il devient difficile de trouver une place dans une marina aux Canaries en novembre. C’est vrai qu’il reste quelques mouillages, mais pour préparer le bateau pour la grande traversée, quelques jours dans une marina sont quand même plus confortables (avitaillement, bricolage, inspection du gréement...). Si la tendance se confirme, dans quelques années il deviendra impossible de faire escale aux Canaries pour traverser librement, à titre individuel, comme nous le faisons, et c’est bien dommage !...

Mais revenons à Las Palmas : Le gars du port nous propose soit de mouiller sur ancre dans le nord de la marina, soit, à mots couverts car c’est interdit, de prendre un des nouveaux pontons en cours d’installation, ce que nous faisons. Les deux possibilités sont payantes, au même prix.
Nous ne faisons peut-être pas le bon choix car :
- nous n’avons ni eau, ni électricité,
- le ponton n’est pas relié à la terre : il faut descendre en annexe,
- ces nouveaux pontons sont extrêmement rouleurs, ce qui fait travailler très dur les amarres et les pare-battages.
Une nouvelle jetée à été construite pour protéger ces nouveaux pontons, mais curieusement, l’entrée du port a été maintenue à l’est, face au large (la houle dominante est de nordet), alors qu’il semblait aussi simple de la mettre  au nord, vers le port de commerce. Bizarre ! Bizarre ! Ces nouveaux pontons resteront donc rouleurs, à moins qu’une chicane ne soit réalisée à l’entrée.
Autre curiosité de ce port : le quai où aboutissent tous les pontons est en contrebas du reste de la ville, et il n’y a qu’un escalier qui permette de franchir ces 4 mètres de dénivelé. Cet escalier est complètement au sud du port, alors que la partie commerçante de la ville est plutôt au nord, d’où un détour de plusieurs centaines de mètres, particulièrement fastidieux quand on revient des courses les bras chargés. A part ces petits inconvénients, Las Palmas offre toutes les ressources d’une grande ville, y compris plusieurs shipchandlers bien fournis.


PUERTO RICO (GRANDE CANARIE)
En longeant la côte sud-est de Grande Canarie, nous expérimentons pour la première fois les célèbres accélérations du vent entre les îles : le vent, faible au départ, fraîchit rapidement 5 à 6 de nordet, puis tombe brutalement 0 à 1 de noroît dès la pointe Maspalomas franchie (pointe sud de l’île). La transition est très franche, on passe de force 6 à force 1 en moins de 100 mètres, et la côte sous le vent de l’île est complètement déventée. Nous essayons d’entrer à Puerto Mogan, mais nous sommes refoulés par les gens du port. Il y a pourtant de la place, ne serait-ce qu’à couple, mais non, rien à faire, le port est plein, ARC, etc...

Nous repartons en arrière vers Puerto Rico. Refrain connu : le port est plein, pas de place, etc... On nous tolère quand même à couple sur un grand catamaran, dans l’avant-port (en nous faisant payer le plein tarif, évidemment...). Mais quand le directeur du port découvre que nous avons un chien à bord, il nous interdit de le descendre à terre, et nous demande de partir dès le lendemain matin (il y a pourtant plein de chiens, sur le port). Charmants, les Canariens du coin !
Seule consolation, nous avons un robinet d’eau (le premier depuis Puerto Calero) : nous faisons le plein d’eau, et nous lavons le pont au jet.


LOS CRISTIANOS (TENERIFE)
Au départ de Puerto Rico, très beau spectacle : le pic du Teide, sur Tenerife, est parfaitement visible, à plus de 50 milles, éclairé par le soleil levant. Nous expérimentons une nouvelle variante des zones d’accélération de vent : vent nul au départ, dans le dévent de Grande Canarie, fraîchissant rapidement 7 de nord, avec rafales à 8, mer courte et creuse avec déferlantes. La traversée est rapide, au vent de travers, mais humide. Et dire que nous avions rincé le bateau à l’eau douce la veille !... Et comme hier le vent tombe brutalement à force 2 de noroît dès franchie la pointe sud de Tenerife, et nous finissons au moteur.
Nous essayons d’entrer à Puerto Colon, mais comme d’habitude, nous nous faisons jeter. Non, pas tout à fait : on nous propose de rester pour la nuit au ponton carburant, à condition d’être partis avant 8h le lendemain matin... Nous rencontrons là deux autres bateaux français, qui se sont fait jeter de la marina de Los Gigantes, plus au nord, et nous partons tous les trois vers Los Cristianos, quelques milles plus au sud, où il n’y a pas de marina, mais où on peut mouiller sur ancre.

Nous resterons 10 jours à Los Cristianos, où de la famille vient nous rendre visite. On mouille dans une grande baie, sommairement protégée par une jetée, avec une belle plage dans le fond. Le mouillage est complètement ouvert au sud, mais on est dans le dévent de l’île, avec des vents faibles de secteur ouest, et quasiment pas de houle. Attention cependant, le lendemain de notre départ, une houle de sud de 2 mètres, venue d’on ne sait où, s’est abattue sur le mouillage et a provoqué une belle débandade vers La Gomera, l’île voisine. Mais pour nous, ce mouillage a été tout à fait confortable... Sauf quand un ferry à foils sortait à toute allure, pour déjauger le plus vite possible, et nous envoyait son monstrueux sillage. Eviter de descendre dans l’annexe à ce moment là.

Le débarquement en annexe n’est pas facile : une échelle unique permet de monter sur le quai, et une multitude d’annexes sont amarrées là en permanence. A première vue, la ville n’a rien d’attrayant : cité balnéaire entièrement bétonnée, pour touristes venus en avion. Mais dès qu’on descend à terre, on est agréablement surpris : on y trouve beaucoup de verdure, et surtout pas de voitures, car le front de mer et les principales rues commerçantes sont réservées aux piétons. Les voitures sont reléguées quelques centaines de mètres en arrière, et c’est bien agréable (pourquoi ne faisons-nous pas ça en France ?). La ville offre toutes les ressources de base, et même un petit shipchandler.
Là aussi, une visite de l’intérieur de l’île s’impose, en particulier la vallée de la Orotava, et le parc national du Teide. Pour ce dernier, une petite laine est utile : la route monte à plus de 2000m d’altitude, et si vous voulez monter au sommet du volcan (à pied pour les sportifs entraînés, ou en téléphérique), n’oubliez pas qu’il culmine à plus de 3700m.  C’est le point culminant de l’Espagne.

Tenerife - Le Teide
Le pic du Teide sur Tenerife

SAN SEBASTIAN (LA GOMERA)

A 20 milles à l’ouest de Tenerife, San Sebastian est le seul port de l’île de La Gomera. Incroyable mais vrai, il y a une marina avec de la place !!! Pontons à catways, eau et électricité : le grand luxe, quoi ! Parfait pour préparer la grande traversée. La ville est sympathique, tout à fait à l’écart des nuées de touristes. Par contre, les ressources restent assez limitées : petit supermarché, commerces de base et marché deux fois par semaine. Il est prudent de laver à l’eau douce les fruits et les légumes, afin de ne pas embarquer de bestioles indésirables à bord. Tous les équipages font ça sur le ponton, dans une ambiance de lavoir du début du siècle. A noter qu’on trouve ici de grands paniers en plastique souple noir, contenant environ 25 litres, et qui sont parfait pour la lessive. Tous les bateaux s’en équipent. Pour le gasoil, il faut aller bidonner à la station service, à quelques centaines de mètres, et un diable ou équivalent est bien utile. A noter également une station de remplissage de bouteilles de gaz.

L’ambiance dans le port est très nettement “départ” : tous les bateaux en escale ici s’apprêtent à partir, soit pour le Cap Vert, soit directement pour les Antilles, et chaque jour voit le départ d’un ou plusieurs bateaux (concert de cornes de brume pour les Anglo-saxons, les Français sont plus discrets). Nous avons des précédents célèbres : Christophe Colomb est parti d’ici en 1492, et Antoine, le chanteur, part quelques jours avant nous pour le Cap Vert, en solitaire sur son cata jaune BANANA SPLIT.

Il paraît que l’intérieur de l’île est très beau, et mérite une visite. Pris dans l’ambiance départ, et fort occupés par la préparation du bateau, nous n’avons pas visité l’île, et peut-être avons nous eu tort...

Et le premier décembre 98, en fin de matinée, nous larguons les amarres, cap sur la Barbade, à 2600 milles de là...

La Gomera
La Gomera - Millivore prêt à partir pour la grande traversée

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  ANNEXE : Les moyens de communication
Décembre 1998


Ayant quitté la France pour un an, il est évidemment nécessaire de garder le contact avec la famille et les amis restés en métropole. Voici comment nous traitons le problème, à bord de MILLIVORE :

Tout d’abord, aux escales (on passe bien plus de temps en escale qu’en mer !)

Le courrier
Pour l’envoyer, pas de problème : il y a des bureaux de poste partout. Pour le recevoir, c’est moins simple. Dans les grands ports, on peut généralement se le faire envoyer au bureau du port, à condition d’être sûr d’y faire escale, ce qui n’est pas gagné aux  Canaries, par exemple.
La poste restante marche bien, à condition de bien préciser le bureau de poste, mais c’est cher : pour retirer le courrier, il faut payer pour chaque lettre une somme qui vaut largement le prix d’un timbre.

Le téléphone
Les cabines fonctionnent le plus souvent avec des cartes, qu’on peut se procurer assez facilement, comme en France. Le risque est de se trouver en fin de validité d’une carte en cours de conversation. Pour éviter ça, nous utilisons une carte France Télécom, qui permet de téléphoner de l’étranger avec un numéro gratuit. Le montant de la communication est débité sur un compte bancaire. C’est très pratique, ça marche très bien en Espagne et au Portugal, mais pas dans les petits pays comme la Barbade, par exemple. Là, une solution simple et efficace est d’appeler en PCV, à condition bien sûr que le correspondant soit d’accord.

Le courrier électronique (E-mail)
Simple et efficace, à condition de trouver un accès Internet. Nous en avons trouvé un (gratuit) au musée des sciences de la Corogne, un autre (payant à pièces) dans un hôtel de Tenerife, et un “cybercafé” (cher) à Los Cristianos. Ce n’est pas encore très répandu... Côté terre, il n’est pas nécessaire d’avoir un PC connecté à Internet, un simple minitel suffit.

Et en mer ?

Après avoir étudié la question, nous avons renoncé aux systèmes par satellites INMARSAT (standard C, M, mini M...), devant le coût monstrueux des équipements et des communications.
Nous avons renoncé également à la BLU marine, devant le coût de l’équipement, et la difficulté légendaire de ce système à obtenir les communications (ça n’a pas dû s’arranger depuis la fermeture de Saint Lys Radio).

Les radioamateurs
Début 98, j’ai décidé de passer la licence de radioamateur. Pour pouvoir transmettre sur les bandes HF permettant des longues portées, il faut passer un examen assez raide, comportant 3 volets :
- Des connaissances de base en électronique et radio (rien de bien méchant)
- Une connaissance de la réglementation (très fastidieux, de nombreux tableaux de chiffres à connaître par coeur)
- Et la connaissance du morse. C’est le plus dur ! Même à faible vitesse, pour l’examen, ça nécessite des centaines d’heures de pratique, et c’est particulièrement fastidieux.
Par chance, j’avais étudié le morse pendant mon service militaire, et j’ai pu me remettre à niveau en quelques mois, malgré 18 ans d’interruption. J’ai obtenu ma licence fin mai 98, et j’ai immédiatement équipé MILLIVORE d’une petite station de radioamateur, travaillant sur la seule bande de 14MHz (la plus performante en terme de portée). Coût environ 7000F, et quelques heures de bricolage.
Les résultats sont spectaculaires, malgré une puissance d’émission limitée volontairement à 50W pour ne pas épuiser les batteries du bord. Parmi bien d’autres :
Avant de partir, depuis la baie de Quiberon, j’ai contacté un employé du port de Vilamoura, au sud du Portugal, que nous avons rencontré quand nous y avons fait escale, 3 mois plus tard.
Depuis le Portugal, j’ai régulièrement eu des contacts avec la France, le Québec, les Antilles (j’essaie de communiquer principalement en français, c’est plus agréable !).
Durant la traversée de l’Atlantique, j’ai eu quotidiennement des contacts avec la France, la Belgique, et le Québec, ainsi qu’avec un voilier belge qui traversait en même temps que nous.
Un soir, au sud-ouest des Canaries, j’ai eu un contact parfaitement clair avec Nouméa, en Nouvelle Calédonie. J’aurai du mal à faire plus loin, c’était quasiment aux antipodes !
Un radioamateur de Morlaix, avec qui j’étais en contact quotidien, savait à tout moment où nous nous trouvions, et donnait de nos nouvelles à notre famille sur simple appel téléphonique.
Un réseau de radioamateurs québécois, le “réseau du Capitaine”, assure bénévolement un service pour les voiliers en mer : contacts quotidiens, météo personnalisée, assistance en cas de problème... (14.118MHz, tous les jours à 12h UTC).
Et plusieurs radioamateurs nous attendent aux Antilles, avec le ti-punch !

Quelques problèmes quand même : incompatibilité d’humeur entre Arthur, notre pilote automatique, et l’émetteur. Bien souvent, quand j’émettais, il était nécessaire que Françoise prenne la barre. Ce problème semble très répandu sur les bateaux, et pas facile à résoudre.
Et parfois, ça ne marche pas... Notamment dans les ports où il y a souvent du brouillage d’origine industrielle. Et la forêt de mâts métalliques des marinas ne facilite pas la propagation...

Attention ! Le milieu des radioamateurs est assez fermé. Un de nos amis-bateau possède à son bord une station pirate (illégale en France), et n’a pas de licence. Durant la traversée, nous étions convenus d’un contact quotidien, mais au bout de quelques jours, on lui a fermement demandé de cesser ses émissions sur les bandes réservées aux radioamateurs.
Il existe un réseau pirate (Radio Cocotiers), totalement illégal, qui fonctionne sur 13.970MHz. Je n’y ai pas accès car cette fréquence est en dehors des bandes radioamateur. Il faut avoir une station pirate elle aussi, comme celle de nos amis, pour communiquer sur ce réseau. Les participants ne donnent jamais leur nom ni celui du bateau, pour éviter les ennuis avec les autorités !...
Un réseau (tout à fait légal, lui) fonctionne aussi sur la bande CB (27.530MHz), mais les longues portées sont beaucoup plus aléatoires sur cette fréquence, et les brouillages par les CB de voitures sont fréquents.
 
Pour l’avenir : les nouveaux réseaux satellites
Plusieurs réseaux de satellites en orbites basses sont en cours de mise en place, et permettent, ou permettront de communiquer directement vers un satellite avec un terminal guère plus gros qu’un téléphone portable. A ma connaissance, les premiers réseaux en place sont ORBCOMM (texte seulement) et IRIDIUM (téléphone), mais d’autres vont suivre. Le coût des équipements et des communications est certainement encore prohibitif, mais on peut espérer une baisse spectaculaire dans les prochaines années (rappelez vous le prix des GPS !).
Peut-être pourra-t-on bientôt téléphoner de n’importe où dans le monde pour un prix raisonnable...

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ESCALES AUX ANTILLES
De la Barbade à Saint Martin

Mars 1999


Suite de notre périple atlantique à bord de MILLIVORE : nous quittons San Sebastian de la Gomera, aux Canaries, le 1er décembre 98, et le 20 décembre nous arrivons à la Barbade.
Comment s’est passée la traversée ?
Trois jours de petit temps au début, puis le vent se lève, irrégulier en force et en direction, 20 à 30 noeuds, de sud-est à nord-est. Mer creuse, courte et croisée, très inconfortable. Avec des GGG (gros grains gris) tous les jours, des rafales jusqu’à 45 noeuds, et de la pluie. Certains jours, on se serait cru en Bretagne (à part la température...). Et tout ça, jusqu’à l’arrivée !
Bref, la traversée sous l’alizé régulier, comme dans les livres, avec soleil, petits cumulus, et longue houle régulière, nous ne connaissons pas !
Nous n’aurons cependant aucune avarie sérieuse, juste quelques coulisseaux de grand-voile cassés lors d’empannages, contrairement à bien d’autres bateaux. Mais nous sommes bien contents d’arriver à la Barbade.

Alizé
Durant la traversée, avec un Alizé frais

BRIDGETOWN (LA BARBADE)
Un seul abri pour la plaisance : Carlisle Bay devant Bridgetown, la capitale de l’île. C’est un joli mouillage, bien abrité de l’alizé, très vaste, et bordé par une belle plage de sable. Des dizaines de bateaux sont mouillés là, de tous types et de toutes nationalités.

Il faut faire rapidement les formalités d’entrée, au port de commerce. On peut soit mouiller à Carlisle Bay, et y aller à pied, soit entrer d’abord au port de commerce avec le bateau, faire les formalités, et repartir mouiller ensuite. On peut facilement s’amarrer dans le port, à quai. Pas de problème pour monter sur le quai : le marnage n’est ici que de 50cm, les échelles sont inutiles, même à marée basse !
Les autorités apprécient que l’on se signale à la VHF en arrivant. Nous ne l’avons pas fait, et on nous en a fait gentiment la remarque. Il y a pas mal de paperasses à remplir, dans deux bureaux différents (3 en repartant). La clearance coûte 50 dollars barbadiens (25$US), plus une modique taxe de séjour que l’on paye en repartant. Mais tout se passe dans le calme et la bonne humeur. Attention, il est nécessaire de comprendre et de parler un minimum l’anglais !

Le mouillage est très agréable, tous les bateaux mouillés ici viennent de traverser, ce qui crée une convivialité entre équipages que nous n’avons vue nulle part ailleurs. Nous y retrouvons nos amis de QUINTUS, connus à la Gomera, et ceux de l’ECHAPEE BELLE, connus à Porto Santo et retrouvés aux Canaries.
Pour aller à terre, on débarque en annexe au Boatyard : bar, restaurant et services divers. Les annexes restent sur la plage, sans problème de vol, et on y trouve un robinet d’eau (gratuite). Pour le gasoil, la station service est juste derrière la plage. Dans les deux cas, il faut être équipés en jerrycans, pour ne pas faire trop de voyages, mais on se les prête d’un bateau à l’autre.
La ville est à proximité, et on y trouve presque tout : marché, supermarchés, grands magasins, quincaillerie-shipchandler, et même un magasin de composants électroniques, ce qui nous a permis de dépanner le groupe électrogène de QUINTUS. Beaucoup de magasins sont duty free. Nous n’avons pas essayé, mais il semble qu’on puisse acheter en détaxe, en présentant les passeports et les papiers du bateau.

Nous passons Noël à Bridgetown. Le 25, des équipages australiens organisent un grand barbecue au Boatyard, où tous les équipages sont conviés. Ils attendaient une cinquantaine de personnes, nous nous retrouvons près de 140, dans une sympathique ambiance, avec distribution de cadeaux à chacun.
Après huit jours de séjour confortable, une petite houle de sud entre sur le mouillage. Pas au point de rendre le mouillage rouleur, mais formant de belles déferlantes sur la plage. Dans ces conditions, il vaut mieux descendre en maillot de bain, avec ses vêtements, papiers et appareil photo dans un sac étanche. Il y a même un risque sérieux de retourner l’annexe, et certains équipages préfèrent y aller aux avirons pour ne pas risquer de noyer le petit hors-bord.


BEQUIA (SAINT VINCENT - GRENADINES)
Une nuit de mer (agitée) depuis la Barbade, et nous voici à Bequia (prononcez Békoué), île située juste au sud de l’île principale de Saint Vincent. Une grande baie, assez fermée et donc bien abritée, où sont mouillés des dizaines de bateaux. Changement d’ambiance : ici, 80% des bateaux sont des bateaux de location, et nous nous sentons étrangers, avec notre bateau personnel ! Heureusement, nous retrouvons ici QUINTUS, et GINI connu à la Gomera.
Le mouillage est confortable, mais venté. Il doit y avoir une accélération du vent dans la vallée qui débouche sur le mouillage, et nous voyons plusieurs bateaux déraper. Pour descendre à terre, on laisse l’annexe au ponton du restaurant Frangipani, et on n’est qu’à quelques centaines de mètres du “centre ville” de Port Elisabeth. Bequia est un port d’entrée important pour les Grenadines de Saint Vincent, car les guides de navigation du coin déconseillent (peut-être à tort) de faire l’entrée à Saint Vincent même. La douane, l’immigration et la poste sont regroupés dans le même local, ce qui crée une belle pagaille, avec les nombreux équipages des bateaux de location venant faire leur clearance d’entrée ou de sortie. Mais tout s’arrange avec un peu de patience.
Ressources de base dans le village, avec marché et petit supermarché. Et une petite librairie qui vend des guides de navigation, des cartes marines et des pavillons de courtoisie du coin. C’est important car dans la région, presque chaque île est un pays indépendant.
Une nouveauté que nous retrouverons souvent par la suite : des gars du coin sillonnent le mouillage dans des embarcations à moteur hors-bord, et proposent divers services livrés directement à bord : pain, glace, fruits, poissons, langoustes, et même à Bequia eau et gasoil. C’est généralement assez cher, mais ça rend réellement service, surtout dans les petits mouillages où il n’y a aucune ressource à terre. On peut marchander, mais nous hésitons à le faire, car leur niveau de vie est beaucoup, beaucoup plus faible que le nôtre...

Après quelques jours à Bequia, nous partons explorer les Grenadines. C’est un archipel formé d’îles, d’îlots et de récifs de corail, très proches les uns des autres. Les navigations ne dépassent jamais quelques milles, et on trouve partout des mouillages forains dans des sites de rêve... Cet endroit est malheureusement très fréquenté, surtout depuis le développement récent des flottes de bateaux de location. Il faut faire ici, en navigation, une veille anti-collision sérieuse, ce que nous n’avions pas vu depuis la baie de Quiberon !

Bequia
Au mouillage à Bequia

PETIT NEVIS
Ilot désert, à moins d’un mile au sud de Bequia. Le mouillage sous le vent de l’île est minuscule, et reste un peu rouleur, sans être inconfortable. Il faut dire que nous avons un alizé toujours musclé (force 6, grains à 7).
Pas de plage sous le vent, on débarque sur un vieux ponton. A terre, nous trouvons quelques installations ayant servi au dépeçage des baleines, et surtout notre première plage de cocotiers, au vent de l’île. Elle est petite, mais typique : plage de sable blanc bordée de cocotiers mollement bercés par l’alizé, mer turquoise brisant sur les récifs,  on s’y croirait !


CANOUAN (ANSE CUYAC)
Quinze milles plus au sud, l’île de Canouan. Nous mouillons dans l’anse Cuyac, minuscule mouillage bien abrité sous le vent de l’île. Le site devait être joli naguère, mais un hôtel va être construit ici, et la vue est défigurée par des amoncellements de matériaux de construction : graviers, parpaings... et même un énorme tas de sable blanc. Y-aurait-il un projet de plage artificielle ?
L’endroit est complètement déventé par la côte élevée, et le vent est assez imprévisible sur le mouillage : grosses rafales descendant de la colline, longues périodes de calme, et même brises d’ouest... Il faut laisser de la place au bateau pour éviter. Heureusement, l’endroit est peu fréquenté : nous ne sommes que deux bateaux pour la nuit.


MAYREAU (SALT WHISTLE BAY)
Cette petite baie dans le nord de l’île de Mayreau semble sortie d’une carte postale ! Eau verte, plage de sable, cocotiers... superbe ! Un hôtel composé de bungalows occupe la baie, mais les constructions sont quasiment invisibles, dissimulées sous les cocotiers. On est loin du bétonnage du littoral des Canaries ! Ici, les promoteurs immobiliers s’adressent à des clients qui cherchent un contact avec la nature, et c’est bien agréable.
Le jour de notre arrivée, le mouillage est assez encombré, nous mouillons assez loin de la plage et c’est un peu rouleur. Mis le lendemain, miracle ! La plupart des bateaux étant partis, nous nous rapprochons, et ça devient très confortable (Attention, pas beaucoup d’eau : moins de 3m). Seul regret, l’eau est assez trouble, et on a du mal à voir le fond, malgré la faible profondeur.

Salt Whistle Bay
Salt Whistle Bay, à Mayreau

LES TOBAGO CAYS
Très célèbres (et même un peu trop !), à deux milles au vent de Mayreau, cinq îlots à l’abri d’une grande barrière de corail, où nous avons pratiqué deux mouillages différents.

Au sud de Baradal
Très fréquenté, mais il y a de la place. On n’est pas abrité par l’île, mais directement par la barrière de corail, à quelques centaines de mètres. Aucune houle,  le mouillage est très confortable, mais l’alizé frais (nous avons toujours notre 5 à 6, comme depuis plusieurs semaines !) lève un petit clapot qui est gênant pour nager. On en profite quand même, comme dans tous les mouillages de la région, pour aller regarder si l’ancre à bien croché. Cette eau très claire, et à 27̊C a bien des avantages, on ne fait jamais ça en Bretagne !

Entre Petit Bateau et Petit Rameau
Très pittoresque, on est mouillé dans un chenal étroit, entre deux îles avec plages de cocotiers, et c’est beaucoup moins fréquenté que Baradal. Il y a aussi un peu moins de clapot. Il semble qu’il y ait parfois du courant qui puisse faire éviter les bateaux, mais nous ne l’avons pas vu... Rien à voir avec les courants de marée en Bretagne ! Notre alizé musclé nous a toujours maintenus dans la même orientation.
Seul regret, dans la journée, de grands catas day charters viennent déverser sur Petit Bateau des hordes de touristes blancs (le premier jour) et rouges (les jours suivants), et les récupèrent quelques heures plus tard. L’endroit ne retrouve sa tranquillité que dans la soirée.
 

UNION (CLIFTON)
Retour à la civilisation, après 6 jours de mouillage sauvages : Clifton, sur Union Island est un village avec presque une vraie marina. C’est une base active de location de bateaux. Nous mouillons au sud de Green Island, petit îlot, à l’abri de la barrière de corail. Le mouillage est à l’abri de la houle, mais un peu clapoteux, avec le vent toujours soutenu. Très beaux fonds sous-marins, sur les coraux près de Green Island.
A terre, on trouve avant tout un petit aéroport au trafic incroyable. Heureusement, pas de jets, rien que des petits avions à hélices, et le bruit n’est pas gênant. L’Anchorage Yacht Club, est un centre regroupant hôtel, restaurant, laverie, et pontons avec eau (payante) et électricité. On peut y laisser ses sacs poubelles, mais c’est aussi payant... Le village de Clifton est tout petit, et on n’y trouve que les ressources de base.


PALM ISLAND
A moins d’un mille de Clifton (aux Grenadines, on fait vraiment de la petite croisière !). Joli mouillage devant une belle plage, très chic. C’est un peu rouleur, mais quand on est passé à Funchal, on n’y prête plus attention. Par contre, pas de clapot, et la baignade est agréable.

Palm Island
Mouillage de Palm Island

PETIT SAINT VINCENT
Beau mouillage, sous le vent de l’île, devant une grande plage. Hôtel très chic à terre, mais comme toujours très discret, et qui ne dénature pas le paysage. Le mouillage est confortable, pas de houle et peu de clapot. Très beaux coraux, avec de beaux poissons vers le rivage. Petit Saint Vincent sera le mouillage le plus sud d notre croisière (12̊32’N 61̊23’W), et nous attaquons notre remontée vers le nord.


UNION (CHATAM BAY)
Retour à Union, mais sous le vent de l’île cette fois. Chatam Bay est une immense baie, peu fréquentée, dans un site très sauvage, entouré de collines couvertes d’une végétation luxuriante, et sans aucune construction. L’abri est excellent, ni houle, ni clapot. Baignade de rigueur, comme dans chaque mouillage, mais là, surprise ! On nage vraiment au milieu des poissons, de toutes tailles et de toutes couleurs, avec en plus d’énormes coquillages dans le fond. Quand on va au-dessus des coraux, c’est féerique. On voit que la baie est peu fréquentée (aux Tobago, pour voir des poissons, il faut aller les chercher). On a aussi droit à un meeting aérien de pélicans, très spectaculaire !
   

MAYREAU (SALINE BAY)
De retour à Mayreau, nous mouillons à Saline Bay, mouillage principal de l’île. C’est un mouillage agréable, sans houle ni clapot, devant une belle plage de sable (eh oui, encre une !). Un petit village domine la colline. On peut y monter, pour avoir une jolie vue sur les Tobago et les îles environnantes, mais on y est assailli par une bande de gamins, qui mendient sans cesse. Ca gâche le plaisir de la promenade à terre.
Pour nous consoler, nous avons le plaisir de voir arriver nos amis de QUINTUS.


CANOUAN (GRAND BAY)
Toujours en remontant vers le nord, nous mouillons à Grand Bay, le mouillage principal de Canouan, devant le village de Charlestown. Assez fréquenté, nous sommes plusieurs dizaines de bateaux. L’île est assez élevée, et nous sommes dans le dévent. Le vent est faible et imprévisible, les bateaux au mouillage sont orientés tous azimuts. Heureusement, que la baie est vaste, on peut laisser un grand rayon d’évitage entre les bateaux.
Au fond de la baie, une belle plage de sable. Elle est bordée de plusieurs bars et restaurants, dont l’un sonorise toute la baie, le soir. A 300 mètres de distance, la musique est encore très présente, les clients réguliers sont probablement tous sourds, ou le seront sous peu...

Un retour à Béquia, où nous ferons la clearance de sortie achèvera notre croisière aux Grenadines de Saint Vincent.


MARIGOT BAY (SAINTE LUCIE)
Après une traversée de 62 milles (on avait perdu l’habitude de naviguer aussi longtemps !), nous arrivons à Marigot Bay, sur  Sainte Lucie, mouillage très célèbre. Trop célèbre : c’est extrêmement fréquenté, d’autant plus que c’est une base Mooring. C’est quand même très joli : une ria étroite et profonde mène, après une pointe sableuse couverte de cocotiers, à un bassin très fermé, entouré de palétuviers. Le mouillage est petit, et on mouille proches les uns des autres. Heureusement, on est abrité par les collines environnantes, très boisées, et le vent reste faible dans le mouillage.
Les installations Mooring occupent le sud de la baie, et on y trouve aussi le bureau de douane-immigration. Les formalités sont rapides, entrée et sortie dans la foulée, mais c’est assez cher : 45$EC, dont 15$EC d’overtime, car c’était un samedi (Le dollar East Caribbean, ou Biwi, est la monnaie des îles ex-anglaises, il vaut environ 0,4$US). En faisant la queue devant une cabine téléphonique, nous avons la surprise de retrouver là un ami québécois, skipper professionnel, que nous avions totalement perdu de vue depuis plusieurs années. Le monde de la  voile est vraiment petit !
On n’est pas invité à la baignade : l’eau est trouble, et même franchement boueuse après les grains (notre séjour à Marigot Bay est très arrosé !), et en plus, avec tous ces bateaux mouillés dans un bassin fermé sans marée, ça ne doit pas être très hygiénique. Et n’oubliez pas les répulsifs anti-moustiques, on est entouré par la mangrove.

Marigot Bay
Marigot bay, sur sainte Lucie

RODNEY BAY (STE LUCIE)
Il y a une marina moderne dans cette grande baie bien abritée au nord de Sainte Lucie, mais nous choisissons de mouiller sur ancre dans la baie. Dans le milieu de la baie, il y a très peu d’eau, et les bateaux sont mouillés très loin de la plage. Nous préférons mouiller juste au sud de Pigeon Island, où c’est un peu plus profond. C’est aussi bien plus loin de la ville, mais nous n’avons pas besoin de ravitaillement.
Pigeon Island est en réalité une presqu’île, et c’est un parc dont l’entrée est payante. Quand nous débarquons en annexe, on nous demande gentiment d’aller prendre nos tickets à l’entrée. On y trouve les vestiges d’une garnison anglaise installée ici pour canonner les vaisseaux français qui passaient à portée (on n’est qu’à 20 milles au sud de la Martinique), et pour défendre la baie contre les mêmes vaisseaux français (il y avait de l’ambiance dans la région, il y a quelques siècles !). Il ne reste qu’un joli parc, propre et bien entretenu, et bien agréable pour une balade.
Juste à l’est du parc commence une grande plage, suivie d’un terrain vague. Attention, l’endroit semble fréquenté le soir par des individus à l’attitude assez équivoque : mieux vaut rester à bord...


SAINTE ANNE (MARTINIQUE)
Le 19 janvier 99, après près de 5 mois passés à l’étranger, nous arrivons à nouveau en France !
Si, si, malgré les cocotiers, Sainte Anne au sud de la Martinique est nettement un village français. La mairie, la poste, l’église, tout est comme chez nous ! Et c’est bien agréable. Et en plus, on y trouve du vrai pain !
On mouille dans la grande baie, soit devant le village, soit plus au nord devant la plage, ce que nous faisons. Le mouillage est très agréable, les bateaux sont nombreux mais il y a de la place. On débarque en annexe soit sur la plage, soit au ponton devant le village. Le village est sympathique, il y a un marché animé où l’on trouve tous les produits locaux, les commerçants sont souriants... Très agréable escale.


LE MARIN (MARTINIQUE)
La marina de la Martinique ! Elle est située tout au fond du Cul de Sac du Marin. L’entrée est tortueuse, entre les pâtés de coraux, mais le balisage est bien fait  (on est en France !). On peut mouiller à plusieurs endroits ou aller aux pontons dans la marina, mais dans ce cas il vaut mieux réserver auparavant, par téléphone ou par fax.
On s’amarre cul à quai, avec une amarre à l’étrave frappée sur une bouée, assez loin devant. La manoeuvre est pittoresque et il vaut mieux avoir un bateau bien manoeuvrant en marche arrière, ce qui est le cas de MILLIVORE, heureusement... Mais si besoin, un gars du port vient donner un coup de main.
Nous restons 17 jours ici, fin janvier 99, où de la famille vient nous rendre visite. Nous y retrouvons l’ECHAPPEE BELLE, QUINTUS, et TIESTOU et son skipper Willy, un voiler belge qui a traversé l’Atlantique en même temps que nous, et avec qui nous étions en liaison radioamateur quotidienne durant la traversée.
A terre, la douane, et toutes les ressources d’une marina française, avec les commerces spécialisés : shipchandler, voilerie, gréement, électronique...
A ce propos, le gars de DIGINAV, censé être le représentant NKE pour la Martinique, ne me semble pas être à la hauteur : notre pilote automatique Arthur ayant un problème intermittent, l’intervention de DIGINAV s’est limitée à me conseiller d’envoyer tout le pilote en France. Il a même refusé d’envoyer un fax à NKE France... Et nos amis de l’ECHAPPEE BELLE ont également eu des problèmes avec cette société... L’impression est qu’il fait son chiffre d’affaires avec des sociétés de location locales, et qu’il ne souhaite pas s’emm... avec les bateaux de voyage.
Par contre, NKE France, joint par téléphone, m’a gentiment (et gratuitement) envoyé une autre version du logiciel du pilote. A mon avis, ils devraient changer de représentant en Martinique.

Mais revenons au Marin. On y trouve les ressources de base, la boulangerie est sur le port (tarifs Côte d’Azur en août, mais le pain est bon !). Le supermarché est assez loin, sur la route de Fort de France. A proximité, un grand chantier permet de sortir le bateau. Nous y carénons MILLIVORE, qui commençait à en avoir bien besoin malgré les coups de brosse occasionnels lors des baignades. Attention, on travaille ici au rythme antillais, et les employés du chantier ont été suffoqués quand nous avons prétendu sortir le bateau, le caréner au karcher, passer l’antifouling, et le remettre à l’eau dans la même journée ! Ca se fait normalement ici en deux ou trois jours... Mais nous avons tenu les délais, seule une panne du travelift a failli nous empêcher de remettre à l’eau le soir.
Pour aller à Fort de France, pas de bus, mais des taxis collectifs : sorte de mini-bus dont les horaires et les arrêts ne sont pas figés. C’est bien pratique et pas cher du tout. Pas de possibilité de baignade dans le Cul de Sac du Marin : eau trouble et littoral marécageux à mangrove. Comme nous avons une voiture, nous allons nous baigner dans le sud de Sainte Anne, sur la plage des Pétrifications, quelques kilomètres après la plage des Salines trop fréquentée. Belle plage de sable fin bordée de cocotiers, protégée de la houle, et avec la possibilité de garer la voiture à l’ombre. Et en plus les chiens n’y sont pas interdits : Sweet y apprend à nager en quelques jours !


PETITE ANSE D’ARLET (MARTINIQUE)
Nous avions l’intention de visiter la côte au vent de la Martinique, réputée très belle, mais le temps incertain avec un alizé toujours musclé, nous décide à y renoncer. D’autant plus que nous avons à bord pour une semaine, deux membres de la famille sans expérience nautique. Nous remontons donc la Martinique sous le vent, et notre première journée depuis le Marin nous mène à la petite anse d’Arlet.
Très joli mouillage, dans une pette baie, devant une plage et un petit village. Nous mouillons dans le centre de la baie, sur fond de sable. L’eau y est très claire, mais les poissons peu nombreux. Nous y verrons quand même une grande raie ! D’après nos amis de l’ECHAPPEE BELLE, en mouillant près de la rive sud, on nage vraiment au milieu des poissons.
Nous ne restons qu’une nuit, et n’explorons pas le village, qui paraît cependant joli vu du large.

Le rocher du Diamant
Martinique - le rocher du Diamant

SAINT-PIERRE (MARTINIQUE)
Dernière escale en Martinique, nous mouillons devant Saint-Pierre. Pas facile : les fonds descendent très vite, tous les bateaux sont agglutinés dans la petite zone où les fonds sont corrects, et nous nous retrouvons mouillés par plus de 15m d’eau. 50m de mouillage dehors, dont 35m de chaîne de 10, je ferai mon sport de la journée en remontant tout ça au guindeau manuel demain matin !
On débarque au ponton ou sur une petite plage très pentue de sable noir (le volcan n’est pas loin !). La ville de Saint-Pierre est assez triste, elle ne s’est, semble-t-il, pas vraiment remise de sa destruction par une éruption de la Montagne Pelée en 1902. Un musée minuscule, mais néanmoins intéressant, est consacré à l’événement.


PORTSMOUTH (DOMINIQUE)
58 milles de traversée, dont une partie au moteur, sous le vent de la Dominique, et nous voici à Portsmouth, grande baie au Nord de l’île. Plusieurs milles avant d’arriver, nous sommes accostés au large par Ravioli, un gars du coin dans sa barque colorée, qui nous souhaite la bienvenue en Dominique, avec le sourire, et nous propose la remontée de la Rivière indienne avec lui pour le lendemain. Une fois mouillée (près de l’ECHAPPEE BELLE arrivé la veille), un autre gars vient nous proposer des fruits, et c’est tout ! Le comité d’accueil avait pourtant la réputation d’être particulièrement sauvage en Dominique, avec des hordes de gamins s’agrippant au bateau, mais apparemment, c’est maintenant parfaitement organisé.
Descente en ville en annexe pour les formalités. Dans le fond de la baie se trouvent plusieurs épaves de cargos échoués, résultat d’un récent cyclone. L’immigration se trouve dans le centre du village mais il faut passer d’abord à la douane. Pas de problème, me dit le fonctionnaire, c’est à 5 minutes, près du wharf. Il oublie de me dire que c’est à 5 minutes en voiture ! C’est au port de commerce, à l’autre bout de la baie !... Bonne occasion de se dégourdir les jambes !
Le lendemain, Ravioli vient nous chercher à bord de MILLIVORE, et nous emmène sur la Rivière indienne. Très agréable promenade, aux avirons (les moteurs hors-bord sont interdits), sur une belle rivière qui serpente dans une végétation luxuriante, avec commentaires en Français du sympathique Ravioli. La scène doit avoir un petit côté colonial : Nous sommes 4 blancs à bord, et c’est le noir qui rame !
De retour à Portsmouth, suite aux agréables impressions que nous laisse cette promenade, nous souhaitons visiter l’intérieur de l’île en voiture. En quelques minutes, Ravioli nous trouve une voiture assez grande, et comme le chauffeur ne parle pas Français, un autre gars nous accompagne pour les commentaires. Quatre heures plus tard, après la visite de cette île très belle et encore très sauvage, Ravioli est là, au port, et nous ramène à bord de MILLIVORE dans sa barque.
Il semble que les gars du coin ont compris comment traiter les touristes : sourire, amabilité, aucune agressivité, qualité du service, tout y est pour nous inciter à rester ou à revenir...

Rivière Indienne
La rivière Indienne, en Dominique



Côte au vent de la Dominique
La côte au vent de la Dominique

BAIE DE PONT-PIERRE (LES SAINTES)

Nous abordons l’archipel de la Guadeloupe, aux Saintes, dans la baie de Pont-Pierre. Il s’agit d’une baie étroite et profonde ouverte au nord, sur la côte au vent de Terre d’En Haut. Nous entrons par vent frais d’est et mer agitée, c’est assez impressionnant ! Mais la mer se calme très vite dès qu’on pénètre dans la baie. Attention, il y a des coraux partout ! La baie semble peu fréquentée, nous ne sommes que trois bateaux pour la nuit. On mouille dans l’eau verte (qui indique un fond de sable) au fond de la baie, à quelques dizaines de mètres du récif. Le mouillage est très joli, aéré, et bien protégé par trois îlots rocheux. Cela dit, par vent fort de nordet, ça doit devenir houleux, et la sortie risque même d’être dangereuse... Aucune construction à terre, une belle plage de cocotiers au fond de la baie, et des chèvres sur les collines environnantes : splendide ! Evidemment, il faut être autonome, il n’y a aucune ressource. Nous allons nager avec masque et tuba sur les coraux : le récif est magnifique, avec de très beaux poissons, c’est féerique ! L’endroit est digne des plus jolis coins des Grenadines.


MARINA DE RIVIERE SENS (GUADELOUPE)
Après une traversée courte, mais bien arrosée par un GGG, nous entrons à la marina de Rivière Sens, où nous attend Lucien un radioamateur contacté pendant la grande traversée. Cette petite marina tranquille est située au sud de Basse-Terre, sous le vent de l’île. On s’amarre cul à quai, avec une amarre sur une bouée à l’avant, comme au Marin. Mais ici, il y a beaucoup moins de place pour manoeuvrer. Eau et électricité à quai, ponton à gasoil, c’est le luxe ! Un bureau de douanes qui permet de régler les formalités rapidement, un petit shipchandler bien de chez nous (Accastillage Diffusion), et quelques commerces. Pour un ravitaillement plus complet, il faut aller à Basse-Terre, un peu plus au nord. C’est un peu loin pour y aller à pied (surtout le supermarché), et comme nous voulons aussi visiter l’île, et aller à Pointe-à-Pitre, nous louons une voiture.
Lucien sera notre mentor durant notre séjour en Guadeloupe : soirée ripaille et punch avec d’autres radioamateurs, balade vers Pointe-à-Pitre, soirée au carnaval de Basse-Terre... Il est vraiment agréable, en escale, d’être accueillis aussi chaleureusement par quelqu’un vivant sur place !
Nous visitons aussi la Soufrière, sous la pluie (c’est normal, c’est un des endroits les plus arrosés du monde : 12m d’eau par an !), et les chutes du Carbet, où nous ne distinguons plus l’eau de la chute de l’eau de l’averse !... C’est quand même très beau, en pleine forêt tropicale. A Pointe-à-Pitre, nous visitons principalement l’aéroport, où nous allons chercher des amis qui vont naviguer quelques jours avec nous, et bien sûr la marina... Très grande et bien protégée, avec tous les commerces à proximité. Nous y retrouvons GINI, qui nous offre le ti-punch. L’ECHAPPEE BELLE est aussi à Pointe-à-Pitre, mais au mouillage, et nous ne verrons pas nos amis.

Chute du carbet
Chute du carbet, sous la pluie !

L’ANSE A LA BARQUE (GUADELOUPE)
Nous quittons Rivière Sens pour Deshaies, au nord de Basse-Terre, mais une situation météo bizarre nous envoie du vent de nord à nord-ouest   (si, si !) 4 à 6, avec des grains ! Et dire que nous naviguons sous le vent de la Guadeloupe pour avoir une mer calme ! Nous croisons un groupe de gros cétacés (cachalots probablement), et nous nous trouvons en route collision avec l’un d’eux : impressionnant ! Comme nous naviguons au près, tribord amure, c’est lui qui se déroute, et il passe à quelques mètres sur notre arrière...
Nous en avons vite assez de ce vent plein debout, qui continue à fraîchir, et nous nous déroutons sur l’Anse à la Barque, 6 milles seulement au nord de Rivière Sens. C’est un joli mouillage, un peu rouleur avec ce vent de nord, mais probablement confortable en temps normal. De nombreuses barques multicolores sont mouillées sur des corps morts. Des cocotiers dans le fond de la baie, mais pas de plage, ce qui complique un peu la descente à terre (il faut pourtant y aller, Sweet attend...). A terre, aucune ressource, mais un imposant phare qui permet d’entrer même de nuit.


DESHAIES (GUADELOUPE)
Le lendemain, nous entrons à Deshaies, notre dernière escale en Guadeloupe, dans cette grande baie ouverte à l’ouest, le mouillage est encore un peu rouleur, avec le restant de houle de nord d’hier. Ca reste confortable à bord, mais la descente à terre devient délicate : grosses déferlantes sur la plage, plus de 50cm de houle au niveau du ponton... Seule solution : entrer avec l’annexe dans le petit port de pêche, au sud de la baie. L’eau y est parfaitement calme, mais encombrée par de nombreux cordages flottants. Il faut remonter le hors-bord et finir aux avirons. Et il n’y a rien de pratique pour débarquer : on descend directement sur les rochers glissants de la jetée.
La bourgade est jolie, avec tous les commerces de base, poste, banque et restaurants.


ENGLISH HARBOUR (ANTIGUA)
Une traversée agréable au bon plein, et nous entrons dans le superbe mouillage d’English Harbour, à Antigua. Une première baie, ouverte au sud-ouest, est déjà bien protégée des vents dominants, et c’est là que nous mouillons. Elle se prolonge par une autre baie profonde, parfaitement abritée de tous les vents (c’est un trou à cyclone réputé). On y trouve quelques superbes yachts au mouillage ou à quai. Changement d’ambiance : ici, nous ne sommes plus en France, mais en Angleterre ! A terre, les anciennes installations de Nelson forment un parc national, et sont en cours de restauration, dans une ambiance très british !
La clearance et les frais de port (si, si, même quand on mouille sur ancre dans la baie extérieure...) sont assez chers. Peu de ressources à proximité du port, mais on peut prendre un taxi collectif qui nous dépose au supermarché (anglais lui aussi, hélas !), à quelques kilomètres de là. Sur l’autre rive, quelques commerces, dont un shipchandler assez bien fourni. Après deux jours à English Harbour, nous envisageons un départ de bonne heures pour Saint Kitts, à 60 milles. Dès l’aube, j’attend l’ouverture des bureaux pour la clearance de sortie, mais c’est un dimanche... Le gars du port n’arrive qu’à 9h30, et le douanier à 10h30 ! Plus question d’arriver à Saint Kitts avant la nuit : nous décidons de partir pour Five Island Harbour, toujours sur Antigua, et de traverser de nuit ensuite directement sur Saint Barth.

Antigua
Mouillage d' English Harbour à Antigua

FIVE ISLAND HARBOUR (ANTIGUA)
Une immense baie, ouverte à l’ouest, donc bien protégée des vents dominants. On peut mouiller un peu partout, devant de belles plages de sable, dans des sites très sauvages, sans aucune construction. Très joli coin, mais sans aucune ressource. Et peu fréquenté, nous n’étions que quelques bateaux sur notre mouillage. Pas de baignade, l’eau est trop froide. On a tellement pris l’habitude de se baigner dans des eaux à 27 - 28̊C, que quand elle tombe à 25̊C, on la trouve glaciale !
Et à 19h, nous partons pour une nuit de mer vers Saint Barth.


GUSTAVIA (SAINT BARTH)
Nous arrivons à Gustavia à 8h le lendemain, après une agréable nuit au grand largue par mer belle. Des dizaines de bateaux sont mouillés devant l’entrée du port, très sommairement abrités. Appel à la VHF, oui, oui, il y a de la place à quai pour nous. Nous nous retrouvons cul à quai, avec une ancre mouillée sur l’avant, entre deux énormes motor-yachts de plus de 30 mètres chacun : MILLIVORE donne l’impression d’être une annexe de l’un d’eux ! Au début, c’est pittoresque, mais on en voit vite les inconvénients : ces grosses bêtes font tourner leurs groupes électrogènes 24h sur 24, et comme le port est complètement déventé, on baigne en permanence dans une odeur d’échappement de diesel. Et en plus, ça fait du bruit !
Gustavia est une jolie bourgade, mais tout y est très cher. Mais oui, mais oui, c’est un port franc ! Mais les commerçants semblent compenser l’absence de taxes par leurs marges bénéficiaires...
Non, tout n’est pas cher ! Nous ne payons que 70F par jour pour la place de port de MILLIVORE, mais l’eau est payante (12 centimes par litre). Tous les bateaux, y compris les gros monstres, sont mouillés comme nous, cul à quai, avec une ancre à l’avant, d’où un joyeux mélange d’ancres et de chaînes dans le fond du port. Chaque fois qu’un gros yacht essaie de relever son mouillage, il en relève aussi deux ou trois autres, et passe un certain temps (souvent plus d’une heure...) à démêler son mouillage du sac de noeuds. C’est assez réjouissant (pour les spectateurs...), mais nous demandons quand même comment se passera notre départ. En fait, tout se passera bien, la chaîne et l’ancre remonteront sans problème.


MARIGOT (SAINT MARTIN)
L’île de Saint Martin appartient en partie à la Hollande et en partie à la France. Nous allons mouiller tout naturellement côté français, devant Marigot. C’est une grande baie très ouverte, et la houle de nord-est y entre un peu, mais ce n’est quand même pas Funchal ! On peut aller aussi dans le lagon, grande étendue parfaitement protégée, mais sans beaucoup d’eau, accessible côté français ou hollandais. On y trouve une petite marina, tout près de Marigot. Pas de douane, c’est un port franc, mais formalités d’immigration sur le port. La fonctionnaire, une brave dame en uniforme, est en train de lire le journal quand nous arrivons. Elle nous tend le formulaire à remplir, et se replonge immédiatement dans sa lecture : parfait exemple du fonctionnaire français !
La ville est assez animée, avec de nombreux commerces détaxés. Et là, c’est vraiment moins cher. Un supermarché bien fourni se trouve à la sortie de la ville, en direction de l’aéroport (c’est un peu loin, dommage...).
De retour à l’annexe, après un punch bien mérité sur le port, nous avons la mauvaise surprise de constater le vol de nos deux avirons d’annexe ! Et dire qu’on ne nous a jamais rien volé dans les petits pays à faible niveau de vie ! Nous chercherons en vain des avirons dans les quelques petits shipchandlers de Marigot, et nous repartirons avec deux petites pagaies qui font un peu jouets de plage (mais au moins, on ne nous les volera pas !).
Problème pour échanger les bouteilles de Camping Gaz : on nous renvoie d’un magasin à l’autre, et finalement on nous en indique un à la sortie de la ville (à l’autre extrémité évidemment !), trop loin pour y aller à pied, et nous renonçons. C’est un problème car nous allons entrer dans une zone américaine où Camping Gaz est inconnu... Nous restons deux jours à Marigot, où nous laissons nos amis, et nous partons le 25 février en fin d’après-midi pour une nuit de mer vers les Vierges américaines.


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                  ANNEXE : La production d’électricité


MILLIVORE est assez gourmand en électricité : il est équipé d’un frigo, que nous tenons à utiliser même sous les tropiques (beaucoup de bateaux le coupent aux Canaries), d’un gros pilote in-board (vérin hydraulique sur la mèche de safran), et d’une centrale de navigation (loch, sondeur, anémo, girouette, GPS). Comme la nuit tombe tôt sous les tropiques (vers 18h), nous éclairons bien plus que lors de nos croisières d’été en Europe. Et sa station de radioamateur, installée au dernier moment n’a pas arrangé les choses... Il n’a cependant ni radar, ni guindeau électrique, ni gadgets électroniques comme les lecteurs de cartes...

Lors de notre départ de Bretagne, la production était assurée par 3 panneaux solaires de 18W chacun, à plat pont, et par un alternateur d’arbre d’hélice. Plus évidemment l’alternateur du moteur. Ainsi équipé, la production était suffisante pour assurer nos croisières en Bretagne et en Espagne depuis plusieurs années, au point qu’il n’y avait pas de chargeur 220V à bord. Mais j’avais quelques doutes pour le voyage...
Et en effet, nous avons eu très vite des problèmes de production, dus à plusieurs causes concourantes :
La durée des escales :
En grande croisière, il est fréquent de rester plusieurs jours, voire une semaine et plus au même endroit, ce qui n’arrive jamais en croisière d’été d’un mois. Aux escales, le moteur et l’alternateur d’hélice sont inopérants, et seuls les panneaux solaires produisent.
La couverture nuageuse :
En Europe, le temps est sensiblement plus couvert en automne qu’au mois de juillet. Nous avons eu dans l’ensemble un temps nuageux ou couvert jusqu’au sud de Lisbonne. Et sous les tropiques, le ciel est quasiment toujours nuageux.
La durée des jours :
Beaucoup plus courte en automne qu’en juillet. Ca s’améliore en descendant au sud mais même sous les tropiques, on a guère plus de 12 heures de clarté par jour (toute l’année). J’ai fait le calcul, qui donne un résultat curieux : l’énergie reçue chaque jour par un panneau solaire horizontal est nettement plus faible sous les tropiques (quelle que soit l’époque de l’année), qu’en Bretagne en juin-juillet... Si on ajoute à ça le temps nuageux, et la fait que le rendement des panneaux solaires baisse avec la température, on comprend mieux qu’ils n’arrivent plus à étaler.
La consommation du frigo :
L’isolation du frigo de MILLIVORE est assez sommaire, comme sur la plupart des bateaux de série. J’ai essayé de l’améliorer, mais sans grand succès. Avec une température d’air aux alentours de 30̊C, et une eau de mer à 27̊C, la consommation du frigo a fait un bond monstrueux : de 20Ah par jour en été en Bretagne ou en Galice, elle est montée à 50Ah par jour sous les tropiques !

Tant que l’on navigue, pas de problème : sous voiles, l’alternateur d’hélice produit environ 5A à 5 noeuds, 8A à 6 noeuds, et près de 15A à 7 noeuds. Ceci suffit à tout alimenter, frigo, pilote, électronique... Et en croisière côtière, on fait chaque jour un peu de moteur, ne serait-ce que pour les manoeuvres de port. Mais le problème apparaît dès que l’on reste quelques jours en escale. Un chargeur 220V est utile dans les marinas, mais ne résout pas tout : entre le Portugal et la Martinique, en plus de 3 mois, nous n’avons eu qu’une semaine de marina avec électricité, à la Gomera...

Dès le Portugal, nous avons cherché une éolienne, mais nous ne l’avons trouvée qu’à Las Palmas, aux Canaries. C’est une Air Marine, réputée pour être une des plus performantes (et des plus chères). Je la monte de façon amovible, sur un mât sur la plage avant, uniquement au mouillage. L’idéal est bien sûr de la monter à poste fixe, où elle ne gêne pas, par exemple sur un mât à l’arrière. Sa production était décevante aux Canaries, où la plupart des ports sont sous le vent d’îles élevées, et donc très peu ventés. Par contre, elle est tout à fait efficace aux Antilles, surtout avec l’alizé musclé que nous avons cette année. Inconvénient : elle fait un peu de bruit.

Si on veut franchir un degré de plus dans le confort électrique (congélateur, radar, désalinisateur, télécommunications satellite...), on ne coupe pas au groupe électrogène, malgré ses inconvénients : bruit, carburant, encombrement... Attention, certains bateaux qui ont tout misé sur le groupe électrogène arrivent à le faire tourner 18h par jour, en mer ! Et gare s’il tombe en panne ! (si, si, ça arrive !...) 

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ESCALES AUX VIERGES AMERICAINES,
A PORTO-RICO
ET AUX BAHAMAS

Juin 1999


Jusqu'à présent, notre croisière à bord de MILLIVORE était très classique. Mais alors que la plupart des bateaux français repartent du nord des petites Antilles vers les Bermudes ou les Açores, nous continuons à suivre le soleil... Nous verrons désormais beaucoup moins de bateaux européens, et de plus en plus d'américains et de canadiens.


CRUZ BAY (SAINT JOHN, VIERGES US)
La réglementation britannique sur les animaux nous empêche de visiter les Vierges Anglaises (tant pis pour eux, ils n'auront pas nos dollars !), et nous décidons d'aller tout droit aux Vierges Américaines. Après une nuit de mer assez inconfortable (vent arrière faible et houle), nous voici  à Cruz Bay, port d'entrée de Saint John.
Pas beaucoup de place devant le port, nous mouillons entre les deux chenaux d'accès, parmi les autres voiliers.  La douane et l'immigration occupent le même bâtiment, au sud de l'anse nord du port. Les fonctionnaires sont souriants et efficaces, pas de problème, mais ils veulent voir tout l'équipage en personne. Attention, pour entrer aux USA en bateau de plaisance, un visa est obligatoire, et c'est cher (près de 800F par personne). Nous avons de vieux visas "indefinitely" (gratuits, à l'époque !) qui ne sont plus valables que 10 ans, et qui expirent dans quelques mois. Pas de problème, ca marche, ouf !
Cruz Bay est un petit village, avec les ressources de base. Surprise ! ici on roule à gauche, mais la plupart des voitures ont le poste de conduite à gauche, bizarre, bizarre ! On y savoure le prix du carburant : 5 litres de super pour le petit hors bord de l'annexe pour moins de 2$ !   C'est l'Amérique !

Les Vierges Américaines sont formées d'îles et d'îlots très proches, séparés par des chenaux bien abrités, avec partout de très jolis mouillages : un vrai paradis de la voile ! C'est très peu urbanisé, et bien moins fréquenté qu'on pourrait craindre. Rien à voir avec les Grenadines !
Saint John est en grande partie un parc national, et on ne peut pas mouiller n'importe où. Le bureau du parc nous fournit les infos nécessaires, et nous décidons d'aller le lendemain à Rendez-vous Bay, hors des limites du parc.


RENDEZ-VOUS BAY (SAINT JOHN, VIERGES US)
Un joli mouillage, devant une plage de corail, à 4 milles seulement de Cruz Bay. La plage et le mouillage sont très peu fréquentés. Repos, baignades, et grandes promenades sur la plage avec Sweet en liberté... Une escale comme on les aime !
 

GREAT SAINT JAMES (SAINT THOMAS, VIERGES US)
5 milles plus loin, le lendemain, nous nous arrêtons sous le vent de Great Saint James, petite île au sud de Saint Thomas. Très beau mouillage, tranquille. Comme tous les jours, nous allons nager avec masques et tubas, les coraux sont très beaux, et les poissons nombreux. Mais attention, les oursins sont monstrueux : énormes, avec des piquants très longs et très fins. Evitez de leur marcher dessus !

Saint Thomas
Great Saint James

CHARLOTTE-AMALIE (SAINT THOMAS, VIERGES US)
6 milles de traversée agréable, au portant, et nous arrivons à Charlotte-Amalie. Nous  mouillons au nord du quai des paquebots, parmi de nombreux autres bateaux. A propos de paquebots, nous retrouvons ici VISION OF THE SEA, que nous avions vu à La Corogne il y a 6 mois. Le monde est petit...
Il y a une marina au fond de la baie, où l'on peut prendre un ponton, et où nous laissons l'annexe (il y a un ponton réservé pour ça). Un petit shipchandler nous permet d'acheter une carte de Porto Rico et un pavillon de courtoisie des Bahamas, car il faut penser à la suite du voyage... Un supermarché bien fourni est à proximité, ce qui est bien pratique. Par contre, le bureau des douanes est en ville, loin, et pas facile à trouver, ce qui nous vaut une longue marche en pleine chaleur (nous reviendrons en taxi !). Nous devons en effet faire une clearance de sortie aux Vierges, puis une clearance d'entrée à Porto Rico, bien que ce soient deux territoires US...

Nous quittons les Vierges US trop vite, il y a tant d'autres mouillages a visiter... Mais le temps presse, nous sommes déjà début mars, et nous devons être aux Bahamas avant l'équinoxe. Non, non, pas pour des raisons astronomiques ! Mais pour récupérer un copain qui viendra nous rendre visite... Il faudra qu'on revienne !...


CULEBRA (PORTO-RICO)
Un petit archipel à l'est de l'île principale de Porto-Rico. Le village se trouve au fond d'une profonde baie, l'ensenada Honda. L'entrée est tortueuse, entre les pâtés de coraux, mais le balisage est bien fait. Nous mouillons devant le village pour faire la clearance d'entrée. Le douanier a son bureau à l'aéroport, et ne voit pas souvent passer de bateaux européens. Très sympathique, il nous pose des tas de questions sur notre voyage et nous fait remplir une bonne dizaine de formulaires. Nous passons plus d'une heure avec lui, et repartons avec un "cruising permit", payé 18$, valable pour Porto-Rico et les Vierges US.
Le village est très petit, et n'offre pratiquement aucune ressource. Par contre, il y a plusieurs très jolis mouillages sur Culebra, derrière les barrières de corail, mais nous n'avons pas le temps de nous y arrêter, dommage...


CULEBRITA (PORTO-RICO)
Un îlot à l'est de Culebra, avec une très belle plage, bon abri par vent de secteur est. Attention, les fonds remontent vite, et c'est du corail ! Au premier essai, nous posons l'ancre sur une zone de sable, mais dès que la ligne de mouillage se tend, MILLIVORE vient talonner sur un paté de corail. Ils sont beaucoup plus hauts que le fond de sable (plus d'un mètre). Nous repartons mouiller un peu plus au large.
Lors de la baignade quotidienne, dans une eau très claire, nous voyons la chaîne de mouillage emmêlée dans les coraux, au risque d'y rester coincée. Pas question de mouiller sur câblot, ici, il serait cisaillé en quelques minutes !...
La plage est belle et déserte. Sweet s'y donne a coeur joie, mais l'île est une réserve naturelle, et il est interdit d'aller dans l'intérieur.

Culebrita
Au Mouillage à Culebrita

SAN JUAN (PORTO-RICO)
Après une traversée rapide de 50 milles, au portant, nous entrons à San Juan, capitale de Porto-Rico. La rade est immense, et deux marinas se trouvent au fond d'un long chenal. Nous jetons notre dévolu sur San Juan Bay Marina car dans l'autre, il n'y a que des gros bateaux à moteur. Ce n'est peut-être pas le bon choix... On s'amarre à l'américaine, cul à quai, sans catway, avec l'avant amarré sur deux pieux plantés dans l'eau. Ces pieux sont inaccessibles de l'étrave d'un voilier (ils sont conçus pour les bateaux à moteur très larges à l'avant), et en plus, à la place qui nous est attribuée, un des pieux manque, celui au vent bien sûr !... Comme il y a du vent et du courant, nous nous retrouvons en travers, et il faudra mettre une vraie toile d'araignée de bouts pour maintenir MILLIVORE en place...
Notez qu'on peut aussi mouiller sur ancre devant les marinas, mais la tenue est paraît-il mauvaise.

Pour notre première marina américaine, nous sommes gâtés ! Le ponton et les sanitaires sont vétustes, et le prix est exorbitant : 1.5$ par pied par jour, soit 54$ par jour pour MILLIVORE !...
L'électricité, c'est bien sur du 110V, 60Hz... Pour l'eau, petite subtilité : en Europe, la plomberie est l'un des rares domaines qui n'est pas au système métrique, mais toujours en fractions de pouces. Je pensais donc naïvement que les embouts de tuyaux français iraient sur les robinets américains. Eh bien non ! C'est bien le même diamètre, mais pas le même pas... Il faut bricoler un adaptateur.

Mais tout ça ne doit pas vous décourager de faire escale à San Juan. La vieille ville est très belle, avec la citadelle El Morro qui domine l'entrée de la baie. On y trouve un supermarché proche de la marina, et plusieurs shipchandlers dont un grand en face du capitole. L'île mérite une visite de l'intérieur. Nous avons loué une voiture, et visité la forêt pluviale, le radiotélescope d'Arecibo, impressionnant (le plus grand du monde, 300m de diamètre), et les grottes du Rio Camuy, spectaculaires.

Entrée de la rade de San Juan
Entrée de la rade de San Juan

Un problème permanent aux USA : on n'y trouve pas de bouteilles Camping Gaz... Et ils remplissent leurs bouteilles de propane et non de butane... Et les embouts sont évidemment incompatibles... Et il n'est pas prudent de remplir de propane une bouteille conçue pour le butane, car la pression est nettement plus forte... Malgré tous ces problèmes, nous avons pu, sans trop de difficulté, faire remplir une de nos bouteilles Camping Gaz à San Juan. Notez l'adresse : Rodriguez Gas Service, Fernandez Juncos 1000, Santurce P.R.

Et après 6 jours d'escale, nous partons directement pour Great Inagua, première île des Bahamas, à 450 milles à l'ouest. Le régime météo de la région est assez simple : par beau temps, les vents sont réguliers d'est. Mais périodiquement, un front froid arrive par l'ouest. Les vents virent alors à l'ouest par le sud, en fraîchissant, puis repassent à l'est par le nord, jusqu'au front suivant. Cette dégradation du temps dure 2 à 3 jours. Une longue traite vers l'ouest suppose donc de bien choisir le créneau météo entre deux fronts successifs.

Arecibo
Au foyer du radiotélescope d'Arecibo

MATTHEW TOWN (GREAT INAGUA, BAHAMAS)
Trois jours et demi de traversée, par petit temps parfois orageux (impressionnants, les éclairs de nuit !) nous amènent à Great Inagua. Pas de front en cours de route, mais le prochain menace... En approchant, nous sommes frappés par la couleur de l'eau, un spectaculaire dégradé de turquoise, que nous retrouverons dans toutes les Bahamas. C'est très beau, mais attention, c'est dû à la faible profondeur de l'eau sur fond de sable clair...
Matthew Town est une petite bourgade, pratiquement sans ressources. Le mouillage devant le village est abrité du vent d'est, mais complètement ouvert à l'ouest. Pas question de rester là longtemps, avec le front qui approche... Nous descendons à terre, avec deux bidons de gasoil. Le village semble désert, mais nous trouvons un gars qui peut nous vendre du gasoil. Il nous y conduit en voiture, et là, surprise ! nous découvrons une minuscule marina, mais une vraie marina avec quai en béton, 3m d'eau à marée basse (d'après le gars), et un superbe alignement d'entrée. Elle est vide lors de notre passage, mais on doit pouvoir y mettre 4 ou 5 bateaux. Malheureusement, elle est ouverte à l'ouest, et ne nous paraît pas sûre pour les prochains jours avec le front qui approche, dommage...
Le gars, très sympa, nous ramène en ville en voiture avec 35l de gasoil, et nous dépose à notre demande devant le bureau des douanes pour la clearance d'entrée. Formalités rapides, douanier sympa lui aussi, et nous repartons avec un cruising permit valable pour toutes les Bahamas.

Il n'y a vraiment pas d'abri sérieux par vent d'ouest ici, et nous repartons immédiatement. Nous décidons d'aller nous abriter à French Wells, sur Crooked Island. C'est à 120 milles, mais il n'y a rien de plus proche !... Nous ne serons restés que deux heures sur Great Inagua...


FRENCH WELLS (CROOKED ISLAND, BAHAMAS)
Nous approchons de French Wells le lendemain matin, après une nuit de mer inconfortable. Et nous sommes très vite confrontés au principal problème de la navigation aux Bahamas : le manque d'eau !
French Wells est une immense lagune, très peu profonde. Pour y accéder, il faut traverser un banc de sable de plus d'un mille, et il n'y a aucun balisage. Nous entrons très lentement, au moteur, par mer plate heureusement. Nous voyons avec inquiétude l'eau s'éclaircir et la profondeur baisser au sondeur... Une légère secousse, nous avons touché ! Mais MILLIVORE continue à avancer, la quille à ras du fond... Nous touchons à nouveau... Nous avançons toujours... Finalement, nous arrivons enfin en eau profonde (3m...), et nous mouillons. Nous sommes totalement seuls... Nous avons l'impression d'être mouillés en pleine mer : au sud, à l'est, la mer à perte de vue... Mais dès que l'on s'écarte du trou où nous sommes mouillés, il y a moins d'un mètre d'eau, et la mer ne peut pas creuser ! L'endroit est très beau, et complètement sauvage, aucune trace de civilisation. A marée basse, de grands bancs de sable immaculé émergent. Superbe !
Attention pour la baignade ! Nous voyons des requins (sand sharks) à moins de 10m du bord, dans moins de 50cm d'eau... Très courants aux Bahamas. Or, on ne peut pas ne pas se baigner, l'eau est trop belle ! La règle est de ne pas se baigner après 16h, c'est l'heure de la soupe pour les requins...
Il y a des courants de marée ici, et MILLIVORE tire sur son ancre dans un sens puis dans l'autre, au point de la déloger... Ce qui fait que nous chassons au moment du passage du front, et nous nous retrouvons échoués en pleine nuit, par vent fort et sous une pluie battante ! Heureusement, deux autres bateaux nous ont rejoints, et leurs feux de mouillage nous permettent de retrouver rapidement le trou profond pour remouiller.
Par vent d'ouest, la mer déferle sur le banc d'entrée, et il n'est pas question de tenter de sortir dans ces conditions. Il faut attendre le retour du vent au secteur est. Nous repartons après 3 jours d'escale, et nous touchons à nouveau plusieurs fois sur le banc en sortant...  MILLIVORE gardera de son séjour ici une base de quille complètement décapée, où le plomb est à nu, sans trace de peinture, sur 10 cm de hauteur !... Décidément, French Wells est un bon abri et un superbe mouillage, mais on y serait mieux avec un dériveur, ou un cata...

Crooked Island
Crooked Island

CLARENCE TOWN (LONG ISLAND, BAHAMAS)
50 milles de traversée au portant nous amènent à Clarence Town, sur Long Island. Nous sommes sur la côte au vent, mais le mouillage est protégé par un groupe d'îlots et de bancs de corail. Avec ce vent de nord-est assez soutenu, c'est quand même un peu clapoteux, mais on a vu pire...
Coïncidence, sur un dizaine de bateaux mouillés à Clarence Town, nous sommes 4 français, alors que très peu de français naviguent aux Bahamas (on se demande pourquoi, c'est si beau !...). Les américains n'en reviennent pas !
Peu de ressources dans le village, mais une sorte de coopérative ou l'on trouve des fruits et des légumes frais, et une petite épicerie ou nous trouvons, entre autres, de très bons "chart books" des Exumas et des Bahamas du nord, nos prochaines escales. Juste ce qui nous manquait...


CAPE SANTA MARIA (LONG ISLAND, BAHAMAS)
Un merveilleux mouillage, derrière la pointe nord-ouest de Long Island. Cette baie ne porte pas de nom sur notre documentation, mais elle se situe entre le cap Santa Maria et Calabash Bay. La baie est vaste, parfaitement protégée des vents de secteur est, et surtout, il y a de l'eau ! On mouille dans 3m, confortable pour les Bahamas.
Nous sommes totalement seuls dans cette grande baie aux eaux turquoise parfaitement claires. A terre, plusieurs plages de sable blanc, sans aucune empreinte de pas !... Quelques requins, mais on ne peut pas résister, on se baigne quand même (plusieurs fois par jour, mais avant 16h...). L'endroit est trop beau pour repartir dès le lendemain et nous nous accordons une journée supplémentaire dans cette superbe baie.
En arrivant, nous avons franchi le tropique du Cancer. Finis les tropiques ! Mais les escales paradisiaques continuent...

Cape Santa Maria
Au mouillage au Cap santa Maria
Notez Millivore au fond à gauche, tout seul dans cette grande baie

GEORGETOWN (GREAT EXUMA, BAHAMAS)
"La" ville du sud des Bahamas ! En fait, ce n'est qu'un gros village, mais il y a un aéroport avec des liaisons directes vers Nassau et Miami... Georgetown est la base avancée des plaisanciers américains et canadiens. Très peu vont plus loin vers le sud, mais beaucoup passent carrément l'hiver ici.
Le port, c'est Elizabeth Harbour, une très grande rade bien abritée de tous les vents, où plusieurs mouillages permettent d'accueillir plusieurs centaines de bateaux. Ceux qui ont une annexe rapide peuvent choisir de mouiller à 2 ou 3 milles du village, pour être plus tranquilles, car la mer reste toujours plate dans la rade.
On entre dans Elizabeth Harbour par deux passes. Les deux sont tortueuses, entre les bancs de coraux, le balisage est bahamien (c'est à dire inexistant), et les alignements à terre pas toujours évidents à repérer. Le plus simple est de naviguer au GPS ! On avance de way point en way point, avec quand même un oeil sur le sondeur, et l'autre sur la couleur de l'eau (plus c'est bleu, plus c'est profond, et les pâtés de coraux sont plutôt marron...).

Aux Bahamas, les îles sont nombreuses, basses, et la plupart sans aucun amer. Les hauts fonds (très hauts, souvent moins d'un mètre d'eau !) s'étendent à des dizaines de milles en mer, et ne sont pas balisés. Et il y a des courants de marée... C'est vraiment ici que le GPS trouve toute son utilité, mais avant tout, il est évidemment indispensable d'avoir des cartes de détail. La navigation y est assez délicate, surtout pour les quillards. MILLIVORE cale 1.80m, c'est à considérer comme un maximum pour profiter agréablement des Bahamas. L'idéal est de caler moins d'un mètre, c'est à dire de naviguer sur un dériveur intégral, ou un cata.
Mais en contrepartie, quelle zone de navigation ! Des centaines de milles de mer plate, à l'abri des îles ou des bancs de coraux... Des eaux d'une clarté et d'une couleur incroyables... Des îles désertes en quantité (sur 700 îles aux Bahamas, 40 sont habitées ! )... D'innombrables plages de sable blanc... Des récifs peuplés de poissons multicolores... Un climat agréable, pas trop chaud, pas trop humide, du moins en hiver, avec un vent maniable... Tout ca mérite bien une navigation un peu plus délicate !
Et en plus, à part quelques endroits stratégiques, c'est peu fréquenté. Rien à voir avec les îles de Bretagne sud en août, ou les Grenadines !... Pas de bateaux de location : pas fous, les loueurs ! Ils retrouveraient un bateau sur deux planté sur les coraux...
En 1987, nous avions navigué de Georgetown à Nassau, sur le bateau d'amis québécois, et nous avions dit : "Il faudra qu'on revienne, mais avec notre bateau". Douze ans après, aucun regret : c'est encore mieux que dans nos souvenirs !...

C'est donc avec grand plaisir que nous mouillons MILLIVORE devant Georgetown, après une entrée par la passe Est. Le village n'a pas beaucoup changé depuis 12 ans. Un supermarché avec les ressources de base, et son "dinghy dock" bien pratique quand on est chargé, une quincaillerie, quelques boutiques, une station service, une petite marina et quelques petits hôtels... Un village bien sympathique.
Il y a un robinet d'eau gratuite au dinghy dock. Beaucoup la considèrent comme non potable, et préfèrent acheter de l'eau en bouteilles, mais nous avons rempli les réservoirs de MILLIVORE avec cette eau sans aucun problème. Avec quand même quelques gouttes de produit désinfectant, comme toujours sous les tropiques.


GAVIOTA BAY (STOCKING ISLAND, BAHAMAS)
Nous récupérons notre ami Daniel à Georgetown, nous faisons quelques courses, et nous allons mouiller de l'autre côté de la rade sur Stocking Island. L'endroit est un peu plus fréquenté qu'il y a 12 ans, mais il reste de la place. Et c'est toujours aussi joli... Une petite baie très fermée, entourée de plages de sable, donne accès à plusieurs autres petites baies s'enfonçant dans l'île (très bons trous à cyclones, mais très connus...). Les quelques constructions de l'île, hôtel, maisons privées, sont très isolées et ne gâchent pas le paysage. On traverse Stocking Island à pied, par un petit sentier, et on débouche sur la plage au vent, immense et déserte, baignée par le ressac. Longues promenades, seuls sur cette immense plage, avec Sweet en liberté, quel plaisir !

Gaviota bay - Stocking Island
Mouillage de Gaviota Bay



Plage de stocking Island
Sur la plage au vent de Stocking Island

GALLIOT CUT (EXUMAS, BAHAMAS)

Les Exumas sont un chapelet d'îles, d'îlots et de récifs, s'étendant sur plus de 150 milles vers le nord-ouest en partant de Great Exuma où se trouve Georgetown. On peut naviguer au vent des îles, en eau profonde, mais ce n'est pas encore l'océan, car Long Island et Cat Island, à trente milles au vent bloquent la houle de l'Atlantique, et la mer reste toujours maniable. Mais si on supporte le "rase récif", on navigue sous le vent des îles, sur une mer totalement plate, avec ses superbes dégradés de turquoise... et avec un oeil sur le sondeur (jamais plus de 4m d'eau, et souvent bien moins !). Les "cuts" sont les passages permettant de passer d'un côté à l'autre.

Au départ de Great Exuma, il n'y a vraiment pas assez d'eau pour nous sous le vent des îles, et nous naviguons au vent, par petit temps, jusqu'à Galliot Cut. Nous mouillons devant la petite plage de Big Galliot Cay. Bon abri, mais il y a un peu de courant, comme toujours près des cuts. Le site est totalement sauvage, aucune construction à terre. Nous sommes rejoints peu après par CHRYSALIDE, un voilier belge qui termine un tour du monde de 6 ans, et avec qui nous sympathisons rapidement. Plage, baignades, punch, longues discussions, on ne voit pas le temps passer ! L'eau est d'une clarté incroyable : le soir, le vent tombe, et à la seule clarté de la lune, nous voyons parfaitement le fond, par 3.5m d'eau, et même toute la ligne de mouillage, avec ses 30m de chaîne et l'ancre !

Millivore et Chrysalide, à Big galiot cay
Millivore et Chrysalide, à Big galiot Cay

STANIEL CAY (EXUMAS, BAHAMAS)
Le lendemain, en route pour Staniel Cay, sous le vent, suivis prudemment par CHRYSALIDE (qui cale bien plus que nous...). Staniel Cay est un groupe d'une demi-douzaine d'îles et d'îlots, avec un village, et même une petite marina.  Pas beaucoup d'eau (comme d'habitude) dans le coin, et nous mouillons dans le chenal profond, bientôt rejoints par CHRYSALIDE. Ressources limitées dans le village, mais quand même une épicerie, qui doit bien faire 10m², et un supermarché, qui en fait au moins 20 ! Attention, tout est très cher ici. On y trouve aussi un restaurant, Happy People, rustique mais très bon !
Staniel Cay est célèbre pour "Thunderball Grotto". Un des îlots est creux, et forme une grotte à demi submergée. On y entre normalement à la nage, à marée basse, mais nous choisissons d'y aller avec l'annexe, pour pouvoir amener l'appareil photo. L'entrée est basse, nous sommes aplatis dans l'annexe, mais ça passe. A l'intérieur, magnifique ! Une voûte de corail, percée de quelques trous qui laissent entrer la lumière, une eau parfaitement claire, des poissons innombrables, des coraux superbes... L'endroit est connu, et nous sommes une bonne quinzaine à nager dans la grotte, mais pas de bousculade. On a tourné un "James Bond" dans cette grotte, qui lui a donné son nom.

Thunderball Grotto
A l'intérieur de Thunderball Grotto

BIG MAJORS SPOT (EXUMAS, BAHAMAS)

Changement de mouillage le lendemain, toujours dans le groupe de Staniel Cay, vers Big Majors Spot, à moins de 2 milles. Une vaste baie, bordée par une belle plage de sable blanc. C'est assez fréquenté, mais il y a de la place pour tous. Curiosité, il y a des cochons sauvages sur la plage ! Ces braves bêtes sont habituées aux plaisanciers, et dès qu'une annexe s'approche de la plage, elles se précipitent dessus pour quémander de la nourriture. Probablement inoffensifs, mais impressionnants, car ce sont de très gros cochons ! Mais c'est une bonne façon de se débarrasser des déchets organiques (comme sur toutes les îles désertes, il est évidemment hors de question de déposer ses ordures à terre).
                                               

HAWKSBILL CAY (EXUMAS, BAHAMAS)
Nous continuons notre remontée vers le nord-ouest, et 30 milles plus loin, nous mouillons à Hawksbill Cay. Nous nous approchons de la plage, en évitant plusieurs pâtés de coraux (soleil dans le dos, et lunettes polarisantes de rigueur). Un seul voilier est déjà mouillé là. Surprise ! Il s'agit de GRATITUDE PLUS, le voilier de notre ami Germain le Québécois, le Germain qui nous a fait découvrir les Bahamas il y a 12 ans, et que nous avons retrouvé par hasard à Marigot Bay il y a deux mois... Nous allons arroser ça !

Hawksbill Cay est un merveilleux mouillage. A terre, une grande lagune avec de grands bancs découvrants de sable blanc, des plages superbes, des petites collines d'où on a une vue magnifique... Et c'est très peu fréquenté... Sur la colline, on trouve une boîte aux lettres dans laquelle se trouve un cahier où tous les équipages laissent un message. A la lecture, c'est clair, tout le monde apprécie ce mouillage ! Nous resterons deux jours ici, en compagnie des sympathiques Québécois.

Hawksbill cay
Hawksbill Cay

Hawksbill cay
Hawksbill Cay

ALLENS CAY (EXUMAS, BAHAMAS)

20 milles plus loin, effectués par vent frais mais mer plate (nous sommes toujours sous le vent des îles), nous arrivons à Allens Cay (ou Allans Cay), un groupe de trois îlots. On peut mouiller sous le vent du groupe, les petits tirants d'eau ont un très joli mouillage dans une baie de l'île sud. Nous mouillons entre les 3 îles, devant Leaf Cay. C'est très profond, 4 à 5m d'eau, le grand luxe pour les Bahamas !
Les trois îles sont peuplées d'iguanes. Il y a 12 ans ils étaient assez farouches, et nous avions dû chercher pour en voir, mais maintenant, ils se précipitent dès qu'une annexe s'approche pour quémander de la nourriture. C'est assez impressionnant, car ils sont très nombreux, et n'ont pas l'air très sympathique...
Nous sommes à 35 milles de Nassau, la capitale des Bahamas, et c'est un peu trop près : de grands bateaux, genre cigarette, très rapides, amènent des touristes pour photographier les iguanes, et font l'aller-retour en quelques heures. Ils sont propulsés par 4 gros hors-bords, et l'un d'eux en a 4 de 250 CV chacun ! Comme par hasard, il est sponsorisé par TEXACO, la compagnie pétrolière...

Allens Cay
Iguanes à Allens Cay

NASSAU (NEW PROVIDENCE, BAHAMAS)
Pour rejoindre Nassau depuis Allens Cay, il faut traverser le Yellow Bank sur quelques milles, une zone de hauts fonds parsemée de pâtés de coraux. Il vaut mieux le faire par vent faible, pour avoir une mer plate. On zigzague entre les coraux, avec le soleil dans le dos, et un équipier à l'avant avec lunettes polarisantes pour indiquer la route. Dans ces conditions ça ne présente aucune difficulté.

La ville de Nassau est située sur la côte nord de l'île de New Providence, Le port est en fait le chenal séparant New Providence de Paradise Island, l'île des milliardaires. Deux ponts parallèles relient les deux îles, avec bien assez de hauteur pour nous. Nous entrons par la passe Est. Il est conseillé de signaler son arrivée par VHF à Nassau Harbour Control, ce que nous faisons, mais beaucoup de bateaux s'en dispensent.
Les marinas sont regroupées à l'est des ponts, sur New Providence, assez loin du centre ville, et nous prenons un ponton à Yacht Haven Marina. On peut aussi mouiller à l'ouest des ponts, sur la côte sud de Paradise Island, mais les fonds sont paraît-il de mauvaise tenue et encombrés de débris. Il faut aussi avoir une annexe rapide car le courant peut être très fort.
Il y a un supermarché à proximité des marinas, et plusieurs shipchandlers. Mais impossible de trouver des documents nautiques sur la Floride : seuls les bateaux américains ou canadiens viennent normalement ici, et ils sont déjà équipés en documents sur les USA...
Le centre ville est assez loin, surtout à pied, et on y trouve principalement des magasins pour les touristes que les grands paquebots déversent quotidiennement sur la ville. Une balade vers la citadelle qui domine la ville s'impose, car la vue y est très jolie.
Nous restons plus longtemps que prévu à Nassau, car notre PC tombe en panne. Ici, le vendredi saint est férié, ainsi que le lundi de Pâques. La plupart des gens font le viaduc du jeudi soir au mardi matin, et il nous faudra donc attendre le mardi 6 avril pour refaire marchoter le PC. Mais cette escale forcée se passe agréablement, avec nos amis québécois, qui nous on rejoint ici. Germain nous amène avec son annexe rapide, plonger sur les coraux près de Rose Island, à 3 milles de Nassau : superbes !
Nous en profitons également pour décalquer les cartes des ports de Fort Pierce, et Port Canaveral, en Floride. Ce seront nos seuls documents nautiques pour entrer aux USA...
L'ami Daniel nous laisse à Nassau, enchanté de son séjour, et nous partons vers les Berrys à deux, plus évidemment Sweet, notre "quatre pattes" comme disent les radioamateurs.

Nassau
Millivore à Nassau

LITTLE HARBOUR CAY (BERRYS ISLANDS, BAHAMAS)
Les Berrys Islands sont un archipel au nord de New Providence. Après une traversée ventée, à 7,3 noeuds de moyenne, nous mouillons entre Little Harbour Cay et Cabbage Cay. L'abri est bon, mais la zone assez profonde pour nous est étroite. Heureusement, nous sommes seuls en arrivant, un bateau anglais viendra nous rejoindre un peu plus tard. Nous descendons Sweet sur la petite île de Guano Cay, à quelques centaines de mètres, où nous avons une belle plage de sable pour nous tous seuls.

Little Harbour Cay
A Little harbour cay

GREAT STIRRUP CAY (BERRYS ISLANDS, BAHAMAS)
Le lendemain, 20 milles plus au nord, nous mouillons dans la rade entre Great Stirrup cay, Great Harbour Cay et Goat cay. L'abri est bon, mais les îles sont rocheuses, pas de plage à proximité. Il faudra faire un bon mille en annexe pour descendre Sweet sur une petite plage un peu vaseuse devant une mangrove.


LUCAYAN MARINA VILLAGE (GRAND BAHAMA, BAHAMAS)
Le lendemain, après une traversée de 61 milles par beau temps très chaud, nous prenons un ponton à Lucayan Marina Village, une des marinas de Grand Bahama. C'est le grand luxe : pontons tout neufs, en béton, fixes (ici le marnage est négligeable), avec grands catways, sanitaires somptueux, pelouses dignes de Wimbledon, piscine chauffée (si, si !), avec bar en plein air... Un environnement très agréable et un abri parfait, même je pense en cas de cyclone.
Pas de commerces à proximité, un bateau-navette gratuit nous conduit à Port Lucaya, où se trouvent quelques boutiques, mais le supermarché est à environ 3 km : on y va à pied et on en revient en taxi.
Nous sympathisons rapidement avec nos voisins-bateau américains, John et Sandra de PASSPORT, malgré l'obstacle de la langue, et nous retrouvons ici AERANDIR, qui était notre voisin à Nassau. Nous avons tous trois la même destination : Port Canaveral en Floride, ce qui suppose de traverser le Gulf Stream. Cette traversée est la hantise des plaisanciers américains. Le courant est très fort, 3 à 4 noeuds, et la mer devient paraît-il très vite grosse par vent contre courant. On nous a dit qu'un vent de nord de 12 noeuds suffisait à lever une mer monstrueuse...  Nous attendrons plusieurs jours ensemble un créneau météo favorable : 24 heures de vent faible à modéré de sud, juste avant le passage d'un front froid. Et le 14 avril 99, nous quittons les Bahamas, archipel de rêve, pour la Floride.

Lucayan Marina
Millivore à Lucayan Marina - Grand bahama

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Annexe : AU MOUILLAGE


En croisière dans les îles, on passe beaucoup plus de temps en mouillage forain que dans les marinas (c'est bien pour ça qu'on est venus !...). Le matériel de mouillage est donc d'une importance primordiale.

La ligne de mouillage
La ligne principale de MILLIVORE se compose d'une ancre soc de charrue de 17kg, de 35m de chaîne de 10mm, et de 50m de câblot de 18mm. Le tout dans la baille à mouillage, à l'avant. Poids important et mal placé, mais la ligne est disponible à tout moment.
Une seconde ligne, composée d'une ancre plate de 17kg, de 25m de chaîne de 10mm, et de 50m de câblot de 18mm, se trouve dans un coffre arrière. Il est à noter que cette seconde ligne n'a jamais été utilisée en 8 ans et plusieurs centaines de mouillages forains.

Nous mouillons donc sur une seule ancre. J'applique la règle "3 fois la hauteur d'eau, mais jamais moins de 25 mètres", et même souvent 30m s'il y a de la place. Quand le bateau est stabilisé, je ne laisse pas la chaîne tirer sur le guindeau : un cordage en nylon  reprend les efforts sur les taquets d'amarrage (un oeil épissé à chaque extrémité, autour des taquets, et une manille au milieu, maillée sur la chaîne).
Ce mouillage tient bien sur tous les fonds, même dans les mouillages ventés, comme en Galice ou aux Antilles. Nous n'avons chassé qu'une fois, à French Wells aux Bahamas, malgré un fond de sable à priori très bon. C'était dû je pense à des tractions alternées dues aux courants de marée, qui ont réussi à déloger l'ancre. Une fois remouillés, nous n'avons plus bougé.
Je ne mets jamais d'orin. Je crains toujours qu'un autre bateau me le sectionne, ou pire, qu'il tire dessus et décroche mon ancre... Et puis, ça complique fortement la manoeuvre... Nous avons eu plusieurs fois des difficultés à remonter le mouillage (ah, les ports de Galice !...), mais curieusement, ce n'est jamais l'ancre qui avait croché un objet, mais toujours la chaîne qui s'était emmêlée autour, bizarre, bizarre... Nous n'avons jamais dû abandonner le mouillage, ni avoir recours à un plongeur.

MILLIVORE est équipé d'un guindeau manuel Goïot, qui fonctionne fort bien, mais qui nécessite, un petit entretien régulier, sous peine de le voir se bloquer sans prévenir. Quand on mouille en eau profonde, 12m et plus, la remontée du mouillage est épuisante : sur notre prochain bateau, le guindeau sera électrique !

Nous n'avons pas d'ancre légère en alu à bord. Elles paraissent pourtant séduisantes, mais j'attends que les fabricants nous fournissent la chaîne en alu qui va avec. Il me paraît en effet impensable de mouiller sur du câblot plombé, si on n'est pas sûr à 100% de mouiller sur du sable ou de la vase (et je ne dépasse jamais 95% !). Le câblot plombé sera sectionné en quelques heures sur fond rocheux, et en quelques minutes sur fond corallien... et je ne parle pas des débris métalliques divers des ports espagnols ! Ca limite pour moi l'utilisation de ces lignes légères à la grande plage d'Houat, et encore... je crois que j'hésiterais à laisser MILLIVORE seul...

L'annexe
Elément indispensable de la vie au mouillage. Notre annexe est une "made in Taïwan" distribuée par Plastimo et Big Ship, de 2.6m de long. Spacieuse et confortable, avec ses gros boudins, son inconvénient est d'être très lourde (35kg). Nous la propulsons par un hors-bord Yamaha de 2CV, qui tourne toujours comme une horloge après 9 ans de service. La vitesse reste faible et on ne peut pas envisager de longs trajets avec vent ou courant dans le nez. Elle est parfaite pour la Bretagne ou l'Espagne.
Pour les Antilles ou les Bahamas, on peut envisager un modèle plus performant : beaucoup utilisent des annexes semi rigides Caribe, qu'on trouve au Venezuela pour un prix modique, avec un moteur de 5CV ou plus. Elles sont beaucoup plus rapides, et passent bien mieux dans le clapot.  Le problème est que le moteur commence à devenir lourd et encombrant, ainsi que sa nourrice. Et surtout, que faire de l'annexe en navigation ? Pas question de la traîner derrière, laissons ça aux locataires... Sur le pont, elle gêne les manoeuvres et la vue sur l'avant... Suspendue aux bossoirs à l'arrière, elle a un fardage important et bloque l'accès à la jupe...
Sur MILLIVORE, je la monte sur le pont, je la dégonfle, je la plie, je la mets dans son sac, et je la range dans le coffre arrière. Et ce, même si je dois faire la manoeuvre inverse quelques heures après, au mouillage suivant. Mais j'avoue qu'on s'en lasse vite, et que je préférerais une solution plus simple.
J'espère que les architectes navals se pencheront sur le problème... Sur des bateaux de 12m et plus, on peut je pense envisager un compartiment sous le cockpit et le grand coffre arrière, qui permettrait de stocker une annexe gonflée, et de la rentrer et de la sortir rapidement par la jupe.

Le taud
Indispensable dans les pays fortement ensoleillés (mais aux Antilles, le temps est souvent nuageux...). Nous avons un taud de cockpit placé sur la bôme, et amarré de chaque côté sur les filières. Il est parfaitement efficace, pour le soleil et la pluie, mais oblige à des contorsions pour gagner l'avant. Un bimini sur arceaux métalliques serait plus pratique, mais coûte monstrueusement cher en France. Notez qu'aux USA, on trouve chez les shipchandlers des biminis en kit, en plusieurs largeurs, pour environ 1500F...

La sulfateuse
Non, non, ce n'est pas une blague ! Nous utilisons un petit pulvérisateur de jardin de 5 litres pour nous rincer à l'eau douce après les bains de mer. Simple et efficace, et peu encombrant. On se rince complètement, y compris les cheveux, avec moins d'un litre d'eau. Et comme il faut le remplir quand il est vide, on contrôle parfaitement la consommation d'eau.

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ESCALES SUR LA COTE EST DES ETATS-UNIS
DE CAP CANAVERAL (FLORIDE)
A ANNAPOLIS (MARYLAND)
L'Intracoastal Waterway et la Chesapeake Bay

Juillet 99


Nous sommes déjà sortis des entiers battus en emmenant MILLIVORE aux Bahamas, mais là, notre croisière devient franchement exotique : durant tout notre séjour aux USA, nous ne verrons aucun autre bateau français et les bateaux européens se compteront sur les doigts d'une main...
         
Le 14 avril, nous partons de Grand Bahama pour la traversée de 150 milles vers la Floride. Nous ne sommes pas seuls à profiter du créneau météo : AERANDIR est parti dès l'aube, et PASSPORT une heure avant nous.
Nous longeons d'abord la cote de Grand Bahama sur plusieurs dizaines de milles, et là, en fait de Gulf Stream, nous avons un courant portant au sud-est (en plein dans le nez), de presque 2 noeuds. Nous atteindrons le vrai Gulf Stream dans la soirée. Contrairement à ce qu'on peut croire à la lecture des atlas ou des pilot charts, il ne s'agit pas d'une dérive globale de la mer vers le nord puis le nord-est, le long de la cote Est des USA. En fait, il s'agit d'une sorte de rivière étroite, pas plus de quelques milles de large, et rapide, 3 à 4 noeuds. En dehors de cette veine principale, le courant est plus faible, mais imprévisible et même souvent contraire.
Nous restons quelques heures durant la nuit dans le Gulf Stream, avec des vitesses fond (données par le GPS) impressionnantes : plus de 10 noeuds, pour 6 noeuds au speedomètre ! Le vent est portant et la mer reste maniable. Le vent fraîchit vers minuit, 20 à 25 noeuds, et ça devient moins confortable. Les fonds sont faibles le long des cotes de Floride, à plusieurs milles au large il y a moins de 15 m d'eau, ce qui donne une mer courte très désagréable.


PORT CANAVERAL (FLORIDE, USA)
Pas de problème pour entrer à Port Canaveral, malgré notre documentation sommaire (carte décalquée a la main !), le chenal est balisé sur plusieurs milles au large. Nous prenons un ponton à Cape Marina. Ponton en bois, fixe (mais ici il y a du marnage...), embryons de catways et pieux inaccessibles sur l'arrière : une vraie marina américaine !
L'environnement n'est pas folichon, un chantier naval en bordure d'un port de commerce, mais les sanitaires sont somptueux. Les commerces se limitent à la boutique de la marina, où l'on trouve un peu d'accastillage, des boissons fraîches, et les documents nautiques que nous cherchons depuis longtemps (Ne négligez pas le budget documents nautiques : il en faut beaucoup, et c'est partout très cher...). Pour le reste, il faut louer une voiture.
AERANDIR est arrivé avant nous, et PASSPORT nous suivra de peu. Nous allons faire les formalités d'entrée au bureau des douanes, situé au port de commerce. L'officier d'immigration, appelé par le douanier, vient nous retrouver à la douane, et tout est réglé en quelques minutes, avec le sourire. On nous délivre un cruising permit valable jusqu'à expiration de nos visas, en août.
Nous restons 3 jours à Port Canaveral. Nous espérions que la NASA, dont les installations sont  toutes proches allait effectuer un lancement, pour célébrer notre entrée aux USA, mais non... Ils ne savent pas accueillir les touristes !
Nous louons une voiture une journée, pour visiter Universal Studios à Orlando, et faire quelques courses. Nous achetons aussi un petit chargeur de batteries, qui nous permettra de charger les batteries de MILLIVORE sur le 110 V des prises de quai (On peut avoir du 220 V dans certaines marinas, mais c'est toujours compliqué et cher).
Le troisième jour de notre séjour, un front froid passe. Il mérite bien son nom : la température chute de 15 degrés, temps couvert, pluie et vent du nord soutenu, on se croirait en Bretagne. Cette fois, c'est fini, les tropiques !

Ecluse de Port Canaveral
Dans l'écluse de Port Canaveral

L'INTRACOASTAL WATERWAY
La côte Est des USA est assez inhospitalière pour la navigation : cote basse et sablonneuse, peu d'abris, hauts fond s'étendant loin au large sur lesquels  la mer déferle vite quand le vent monte... Heureusement, il y a l'Intracoastal Waterway (ICW) : tirant profit des nombreuses lagunes existantes et de cours de rivières tortueuses, complétés par des canaux artificiels, les Américains ont créé une voie navigable intérieure, qui longe la côte sur plus de 1200 milles. On peut ainsi aller de Norfolk, en Virginie, jusqu'à Key West, en Floride, en restant toujours en eau abritée. Il n'y a qu'une seule écluse, au sud de Norfolk, mais les ponts sont nombreux. Beaucoup sont ouvrants (levants, tournants ou basculants), et les fixes ont une clearance verticale de 19.8 m (65 pieds), ce qui suffit à MILLIVORE. La profondeur est théoriquement supérieure a 3.6 m (12 pieds), mais en pratique, ce n'est pas toujours vrai...
Le chenal est souvent étroit, et en règle générale, on ne peut naviguer à la voile que par vent portant. En pratique, on avance au moteur, et on s'aide en déroulant le génois chaque fois que c'est possible. Heureusement, le gasoil est au prix américain, moins de 1.50 F le litre.
Les inlets sont les passages permettant de passer de l'ICW à la mer ou vice-versa. On peut ainsi longer la côte par une alternance de traites en mer, et de routes sur l'ICW. Attention, beaucoup d'inlets sont dangereux par gros temps d'est, avec une barre déferlant dans l'entrée : les sorties en mer doivent se faire avec une bonne situation météo.
Les marinas sont nombreuses sur l'ICW, mais les prix sont exorbitants : de 0.8 a 1.5 dollars par pied par jour. Heureusement, on peut assez souvent mouiller sur ancre, généralement sur fond de vase gluante de bonne tenue. Par contre, dans ce cas, l'accès à terre n'est pas souvent facile, terrain marécageux en friche, ou au contraire propriétés privées somptueuses...


TITUSVILLE (FLORIDE)
A partir de Port Canaveral, une écluse et quelques milles de canal permettent d'accéder à l'ICW. Déjà 2 ponts à passer, mais ils ouvrent sans difficulté sur simple appel à la VHF. Le mieux est d'avoir une VHF portable dans le cockpit, et bien sûr quelques connaissances en anglais...
Nous empruntons l'ICW vers le nord, avec le vent en plein dans le nez : moteur de rigueur... Les lagunes de Floride sont le domaine des lamantins, de gros mammifères marins nonchalants, qui passent leurs journées à brouter la végétation. De grosses vaches de mer bien sympathiques, mais malheureusement en voie de disparition. Mais pour l'instant, on en voit encore beaucoup nager autour du bateau. Nous voyons aussi beaucoup de grands dauphins, même souvent à plusieurs dizaines de milles de la mer par l'inlet le plus proche. Du côté aérien, on voit de nombreux pélicans, très gros oiseaux aux plongeons spectaculaires. On voit également beaucoup d'orfraies, aigles à queues blanches, nichant un peu partout, et notamment sur les balises de l'ICW.

Apres une vingtaine de milles de route, nous mouillons devant Titusville, parmi de nombreux autres bateaux. Pour descendre Sweet à terre, plutôt que d'aller en ville, nous choisissons une petite île déserte, où nous avons la surprise de voir des ibis sauvages.

Pont sur l'ICW
Pont basculant sur l'ICW en Floride

DAYTONA BEACH (FLORIDE)
Le lendemain, un peu au nord de Ponce de Leon Inlet, nous touchons dans le chenal : les 3.6 m de fond ne sont vraiment pas garantis... Heureusement, c'est de la vase molle, et nous repartons très vite.
Malgré le passage de quelques barges, l'ICW est le domaine des plaisanciers, les "snow birds", ou oiseaux migrateurs, qui descendent leurs bateaux en Floride pour l'hiver, et le remontent au nord pour l'été. Certains font ça tous les ans. Peu de voiliers, beaucoup de gros bateaux à moteur, genre trawlers. Quelques-uns "oublient" de retirer le pavillon de courtoisie des Bahamas, afin que l'on distingue bien les marins d'eau douce qui ne sortent jamais de l'ICW, de ces héros qui ont osé affronter le Gulf Stream...

Nous mouillons le soir à Daytona Beach, station balnéaire célèbre pour son immense plage de sable dur, où l'on roule en voiture, domaine de la "frime".


SAINT AUGUSTINE (FLORIDE)
Changement de décors le lendemain, en arrivant à Saint Augustine, où nous prenons un ponton pour 3 jours à la marina municipale. Saint Augustine est une des plus vieilles villes de Floride, fondée par les Espagnols, et a gardé une architecture bien typique. Rien à voir avec les cubes en béton de Daytona. Une jolie ville, avec ses vieux quartiers, escale bien agréable. Nous retrouvons ici nos amis Claude et Yvonne, qui viennent nous rendre visite pour quelques jours. Ca fait du bien de revoir les amis, d'avoir des nouvelles fraîches de France, et de lire notre courrier.
Nous profitons de leur voiture pour faire quelques courses, et écumer les shipchandlers de la région. Nous achèterons entre autres deux avirons pour remplacer ceux qui nous ont été volés à Saint Martin.
Nous essayons en vain de faire remplir nos bouteilles Camping Gaz, et nous finissons par adopter une solution radicale : nous achetons dans une grande surface un petit réchaud de camping, fonctionnant avec des cartouches jetables de propane. Posé sur la gazinière de MILLIVORE, il nous permettra d'économiser nos précieuses bouteilles de butane dont nous aurons besoin pour la traversée retour de l'Atlantique. Attention, l'engin est dangereux, pas de sécurité en cas d'extinction de la flamme... Les cartouches de propane se trouvent partout, mais il faut faire attention au prix : 5$ dans la boutique de la marina, 3$ chez les ships, et 3.5$ les deux dans les grandes surfaces...

Marina de Saint Augustine
A la marina de Saint Augustine

FERNANDINA BEACH (FLORIDE)
53 milles plus au nord, toujours sur l'ICW, nous arrivons à Fernandina. Grosse usine de produits chimiques, odeurs nauséabondes, ce n'est pas très accueillant... En plus, il n'y a pas assez d'eau pour nous dans la marina et nous nous retrouvons pour la nuit au ponton carburant. Nous pensions rester un jour, mais vu l'environnement, nous nous enfuirons dès le lendemain matin.


BRUNSWICK (GEORGIE)
Pour rejoindre Brunswick, nous devons quitter l'ICW, et remonter sur quelques milles la rivière qui arrose la ville, ce qui nous vaut de franchir un spectaculaire pont levant. Arrivant sous un gros grain orageux, nous prenons un ponton à Brunswick Landing Marina, une sympathique marina dans un joli environnement. C'est calme, car comme nous ne sommes plus sur l'ICW, il y a peu de passage, mais nous y admirons une réplique du célèbre BOUNTY. Nous resterons 3 jours dans cette agréable escale, d'où nos amis repartirons vers la France.
Nous cherchons depuis plusieurs jours un accès à Internet, pour pouvoir lire nos messages E-mail, et nous le trouvons à la bibliothèque de Brunswick. Ca deviendra vite une habitude : durant tout notre séjour aux USA, nous trouverons un accès Internet dans les bibliothèques, et ce sera toujours gratuit !
Par 31̊ 9' nord et 81̊ 30' ouest, Brunswick est le point le plus à l'ouest de notre voyage.

Bounty à Brunswick
Réplique de Bounty à Brunswick

SAINT CATHERINE SOUND (GEORGIE)
Au nord de Brunswick, l'ICW traverse une région très sauvage. Sur des dizaines de milles le chenal est très tortueux, et traverse d'immenses zones marécageuses : ni ponts, ni routes, ni constructions, la nature à l'état sauvage.
Dans Sapelo River, nous sauvons un naufragé : bricolant sur son moteur en panne, il s'est sérieusement brûlé, et a résolu le problème en sautant à l'eau. Mais emporté par le courant, et handicapé par sa brûlure, il ne peut rejoindre son bateau. Son équipier ne peut rien faire, car le bateau est mouillé (et le moteur en panne...). Nous le récupérons sur MILLIVORE et le ramenons à son bord.
Nous mouillons le soir dans Walburg Creek, près de St Catherine Sound. Impossible de descendre Sweet, nous sommes en plein marécage...

Naviguer sur l'ICW n'est pas difficile mais il est nécessaire d'avoir les cartes détaillées de tout le parcours. En effet, le balisage, c'est "rouge à gauche et vert à droite" quand on va vers le nord, sauf à certains endroits où c'est le contraire ! Et il y a de nombreuses bifurcations avec d'autres chenaux, et des changements de directions spectaculaires. Sans carte, on est sûr de s'échouer, et/ou de se perdre !...


SAVANNAH (GEORGIE)
Le lendemain, nous arrivons à Savannah, célèbre ville de Georgie. Nous prenons un ponton à Palmer Johnson Marina, où nous resterons deux nuits car nous voulons visiter la ville. Savannah est une très jolie ville chargée d'histoire, notamment de la guerre de sécession, avec de nombreux squares pleins de verdure. Malheureusement, nous la visitons par temps froid, gris et pluvieux. Nous y retrouvons BOUNTY, mouillé dans la rivière.
A Palmer Johnson Marina, la coutume est de livrer chaque matin aux bateaux de passage le journal du jour et un sachet de donnuts. Ce sont des pâtisseries hyper sucrées, à la mode américaine, mais c'est bien agréable.


BEAUFORT (CAROLINE DU SUD)
Temps couvert, pluie battante l'après-midi, vent de nord 4 à 5 plein debout, une heure d'attente devant un pont : une journée à oublier !
Mais nous arrivons le soir à Beaufort, trempés, et nous prenons un ponton à Downtown Marina. La ville est jolie, mais nous ne l'apprécions pas à toute sa valeur car nous la visitons le lendemain par temps froid et pluvieux.


CHARLESTON (CAROLINE DU SUD)
Une longue traite au moteur par vent et courant dans le nez. 78 milles au loch et nous arrivons à la tombée de la nuit à Charleston. Ashley Marina est inaccessible pour nous, car au-delà d'un pont fixe trop bas. Nous essayons Charleston Maritime Center, mais c'est complet, et finalement nous traversons Cooper River et prenons un ponton à Charleston Harbour Marina. Pas de regret, car c'est une marina grand luxe, et pas plus chère que les autres.
Le lendemain, journée marathon. Douches le matin, mais comme il n'y a pas de douches à la marina, ça se fait au Hilton voisin, dont deux chambres sont réservées à temps plein à cet effet.
Ensuite, visite du musée naval de Patriot Point, où l'on peut visiter en détail le porte-avions Yorktown, un destroyer ayant participé au débarquement en Normandie, un navire des Coast-Guards et un sous-marin.
Ensuite, visite de la vieille ville en voiture à cheval. Agréable, mais nous avons trouvé Charleston moins jolie que Savannah.
Ensuite, courses au supermarché du coin.
Et le lendemain, réveil à l'aube, car nous partons pour Beaufort, en Caroline du Nord, à 210 milles par la mer (ça nous changera un peu de l'ICW), et nous voulons profiter d'un créneau météo favorable...

Yorktown
A bord du porte-avion Yorktown

BEAUFORT (CAROLINE DU NORD)

Point d'entrée de tous les bateaux qui remontent au nord, car tous les plaisanciers américains sont unanimes : il faut éviter de passer le cap Hatteras par la mer, et donc entrer à Beaufort et rejoindre Norfolk par l'ICW.
Apres 210 milles de traversée depuis Charleston, par petit temps (dont seulement 70 milles à la voile !), nous nous présentons devant Beaufort, à 11h du soir. Nous avons la carte, mais pas le livre des feux. Nous essayons d'entrer quand même, mais nous nous perdons très vite dans la multitude de bouées balisant les divers chenaux... Et il y a des hauts fonds partout... et du courant... Non, rien à faire, il faut attendre le jour ! Nous ressortons pour prendre la cape à l'extérieur, mais comme il n'y a pas de vent et du courant, finalement nous mouillons en pleine mer, à l'écart du chenal d'entrée, par 6m d'eau ! La nuit est agitée car il y a de la houle, et nous maintenons les quarts. Et au petit jour, nous entrons sans difficulté, et nous prenons un ponton à Town Creek Marina.
Nous sommes un peu à l'écart du centre, ce qui nous oblige à marcher pour aller visiter la ville. Ne ratez pas le musée maritime, intéressant et très didactique. Nous n'avons pas essayé, mais il paraît qu'on peut y obtenir le prêt d'une voiture, le temps d'aller faire les courses. Le centre ville est agréable, avec ses boutiques et ses restaurants en bordure du port. Nous achetons un guide de la Chesapeake Bay, qui nous sera bientôt utile (toujours cher, mais on ne peut pas se passer de ces documents nautiques...).
Courses au supermarché, et nous rentrons au bateau crevés (les deux nuits précédentes ont été courtes...).


PUNGO CREEK (CAROLINE DU NORD)
Le lendemain, 63 milles de route, voile et moteur. Le temps très chaud devient orageux dans l’après-midi, et un gros orage nous tombe dessus, toujours inquiétant sous un gréement métallique. La foudre la plus proche tombe à 200m de MILLIVORE...
Le soir, nous arrivons devant Belhaven, mais plutôt que d’entrer dans le port (où l’on peut mouiller sur ancre), nous trouvons un joli mouillage parfaitement calme dans l’entrée de Pungo Creek, et nous y passons la nuit.

Swing bridge
"Swing bridge" sur l'ICW en Caroline du Nord

BROAD CREEK (CAROLINE DU NORD)

Encore une longue journée, mais par beau temps et vent portant, une fois n’est pas coutume. Nous nous arrêtons le soir dans Broad Creek, près de l’embouchure de North River (les géographes américains manquaient un peu d’imagination quand ils nommaient les cours d’eau du coin...). Le mouillage est joli, bien abrité, mais comme souvent nous ne pouvons pas descendre à terre. Et il y a des moustiques...


GREAT BRIDGE (VIRGINIE)
Beau temps et vent faible le lendemain. Nous plantons MILLIVORE en entrant dans Coinjock Bay, mais nous repartons sans problème (C’est parfois bien pratique, la vase molle !). Nous arrivons le soir à Great Bridge, notre première escale en Virginie. Nous prenons le dernier emplacement libre à Atlantic Yacht Basin. Il est à noter que de l’autre coté de la rivière, les pontons municipaux sont gratuits, mais par contre il n’y a aucune ressource à terre. Great Bridge est réputé parmi les plaisanciers américains, car il y a un supermarché à proximité, bien pratique pour ravitailler. Nous n’y sommes pas allés, ayant encore de quoi subsister.


NORFOLK (VIRGINIE)
Le lendemain, nous passons l’unique écluse du Waterway. Etait-elle bien nécessaire ? Il n’y a que 30 cm de dénivelé... Et puis, fini les paysage champêtres, nous approchons de Norfolk. La rade de Norfolk est immense, formée par l’estuaire de la James River, bien plus grande que celle de Brest. Nous arrivons par le sud, partie occupée principalement par le port militaire. Quatre porte-avions, une bonne demi-douzaine de sous-marins nucléaires, des dizaines de destroyers et autres navires de guerre... Impressionnant !
Et quand on pense qu’il y en a d’autres un peu partout en mer... Et probablement autant, sinon plus dans le Pacifique... Mais tout ça n’est pas très accueillant pour nos petits bateaux, d’autant plus que pour y arriver, on traverse une zone industrielle assez sinistre.
Nous sortons du port, qui ne donne pas directement dans l’océan, mais dans la Chesapeake Bay, et nous allons dans Little Creek, quelques milles plus loin, vers la sortie de la Baie. Plusieurs marinas occupent le site. La première, Bay Point marina, n’a pas de place pour nous car un petit Boat Show y aura lieu dans quelques jours. Mais nous trouvons de la place sans problème dans la suivante, Little Creek Marina, qui est d’ailleurs gérée par la même compagnie. Pontons en bois, pas de catways, et toujours ces sacrés pieux sur l’avant, pour amarrer l’étrave.

Mais à part ça, eau, électricité (et aussi téléphone et télé par câble, mais nous n’utilisons pas...), sanitaires très corrects, et une petite boutique. Little Creek étant très bien situé, près de la sortie de la Baie, c’est ici que nous reviendrons dans deux semaines pour préparer MILLIVORE pour la grande traversée de retour. Seul problème, pas de commerces à proximité : pour faire les courses, il faut prendre un taxi, ou louer une voiture.


LA CHESAPEAKE BAY
Nous sommes début mai, et nous voici enfin dans la Chesapeake Bay, l’un des buts de notre voyage, pour lequel nous venons de faire ces 800 milles depuis la Floride, dont 600 sur le Waterway...
Plus qu’une baie, c’est une rade très fermée, ne donnant dans l’océan que par une passe à l’extrême sud. Mais quelle rade ! 180 milles de long, du nord au sud, 30 milles de large, débouché de plus de 50 fleuves ou rivières souvent navigables sur des dizaines de milles (comme le Potomac qui mène à Washington), et de centaines de cours d’eau... des dizaines de ports, mais surtout des centaines de mouillages... Un golfe du Morbihan à échelle américaine, 20 fois plus grand... et bien moins fréquenté. Et tout ça en eaux abritées !
Attention quand même : quand le vent souffle fort du nord ou du sud, dans l’axe de la baie, il peut y avoir de la mer. Mais on n’est jamais loin d’un abri.

La saison avance, et nous n’avons plus que 10 jours pour visiter la baie. Suite aux conseils d’amis québécois et américains, nous avons décidé de visiter principalement la partie nord, et avons les documents nautiques correspondant. Pour ne pas perdre de temps, nous décidons de  monter directement vers Harris Creek, à 24 heures de navigation. (Eh oui, après 24 h, on n’est pas encore au bout !...). D’autant que le vent est portant alors que la météo nous annonce un coup de vent de nordet pour les prochains jours


DUN COVE (MARYLAND)
Journée agréable, par beau temps et vent portant (mais courant contraire), nuit sans vent, au moteur, et surprise ! Brume à couper au couteau au petit jour.  Nous approchons prudemment, jusqu’à trouver une des bouées du chenal de Harris Creek (Vive le GPS !), et nous remontons de bouée en bouée jusqu’à Dun Cove. Un joli mouillage champêtre, entouré de prairies et de petits bois, où nous sommes seuls en arrivant. L’abri est bon du nord au sud par l’ouest, mais à l’est, il y a un petit mille de fetch. Comme le vent se lève d’est, et que la météo confirme le coup de vent prochain, nous changeons de mouillage en fin d’après midi : nous nous enfonçons dans Dun Cove, et allons mouiller dans un bras de la rivière orienté nord-sud. Il y a moins de 3m d’eau, mais l’abri est parfait, et nous passons une nuit parfaitement calme, abrités du vent par un petit bois.

Dun Cove
A Dun Cove

BROAD CREEK (MARYLAND)
Le lendemain, la dégradation du temps est bien là. Sans être le coup de vent annoncé, le temps est couvert et le vent frais. Nous sortons de Harris Creek et nous remontons Broad Creek tant qu’il y a assez d’eau pour MILLIVORE. Le paysage est très joli, mais les rives sont bordées de propriétés privées, et il n’y a pas beaucoup de solutions pour descendre à terre. Finalement, nous descendons Sweet sur une petite île déserte, mais le débarquement n’y est pas facile car de nombreux troncs d’arbres morts sont échoués sur ses rives.


SAN DOMINGO CREEK et SAINT MICHAEL (MARYLAND)
Retour du soleil le lendemain, mais avec un vent de nordet toujours soutenu, et très frais. Une petite traite de 2 milles et demi, et nous allons mouiller dans San Domingo Creek. Une remontée de la rivière en annexe permet d’arriver par le sud aux arrières de Saint Michael, un joli village. Mais attention, ces rivages très découpés forment un vrai labyrinthe, et à notre première tentative, sans carte, nous nous perdons ! Retour sur MILLIVORE pour prendre la carte, et nous arrivons enfin à Saint Michael. Bien que très touristique, ce village a su préserver une architecture typique très agréable. C’est également le siège d’un intéressant musée maritime. Il y a des marinas à Saint Michael, mais elles sont souvent pleines en saison, bien que ce soient parmi les plus chères de la Chesapeake Bay.
La côte ici est tellement découpée que nous ne sommes mouillés qu’à deux milles de Saint Michael, mais que si nous voulions amener MILLIVORE dans le port, il faudrait faire près de 40 milles. Nous faisons quelques courses dans cette agréable escale.

Saint Michael
A saint Michael

CHLORA POINT (MARYLAND)

Le lendemain, nous quittons Broad Creek, et nous remontons Choptank River. Nous mouillons devant Chlora Point, devant une grande plage de sable, totalement déserte. Au moins, ici, pas de problème pour descendre à terre. Le vent, toujours fort, a viré à l’est, et le mouillage est un peu clapoteux, sans être inconfortable. Sur la plage, on trouve de nombreuses carapaces de crustacés bizarres, qui semblent tout droit sortis de Jurassic Park...


WYE EAST RIVER (MARYLAND)
Le temps est brumeux le lendemain matin, mais s’améliore dans l’après midi. Nous remontons la Chesapeake Bay vers le nord, et entrons dans Wye East River. L’entrée est tortueuse, avec des hauts fonds un peu partout, mais le balisage est à la hauteur. La rivière est très sinueuse, et nous mouillons finalement dans une petite baie très sauvage, sans aucune construction en vue. Par contre, nous voyons de nombreux cygnes sauvages, comme partout dans la région, et en descendant Sweet sur une petite plage, nous passons à proximité d’un nid d’orfraie. La femelle qui couve n’apprécie pas, et au retour nous ferons un détour pour ne pas l’effrayer.


ANNAPOLIS (MARYLAND)
Ca y est, la période de mauvais temps est terminée, et nous retrouvons un temps ensoleillé et chaud. Nous partons vers Annapolis à une trentaine de milles. Nous passons le phare de Thomas Point, très célèbre dans la région. C’est une maison toute biscornue, mais une vraie maison, avec un toit rouge, et montée sur pilotis, en pleine mer !... Il date de 1875, ce qui est très vieux pour ici.
Le vent vire au nord et nous finissons au moteur. Malheureusement, j’oublie de couper l’alternateur d’hélice qui est en route depuis le matin. Cet alternateur, conçu pour débiter à faible vitesse de rotation, ne supporte pas d’être entraîné directement par le moteur, et grille complètement. Ca nous vaudra quelques problèmes de production électrique lors des prochaines grandes traversées, et quelques heures de rebobinage l’hiver prochain...

Quelques hésitations en entrant à Annapolis, car le balisage n’est plus comme indiqué sur notre guide, mais nous entrons sans problème.  Annapolis est célèbre pour son Académie Navale, où sont formés tous les marins de l’US Navy. C’est également une ville très tournée vers la plaisance, et surtout la voile. Les marinas et chantiers navals sont nombreux, mais nous choisissons de prendre un corps mort municipal, juste au sud des bâtiments de l’Académie Navale. L’abri est bon, et l’environnement agréable. Quelques centaines de mètres en annexe, et on débarque sur un dinghy dock, en pleine ville. C’est même un peu trop en ville pour Sweet, et nous préférons le descendre sur l’autre rive de la rivière, sur une petite plage.
Annapolis est une ville très agréable, vivante, avec de nombreux commerces. C’est aussi une très bonne escale technique, avec toutes les ressources dont peut avoir besoin un plaisancier, et notamment un grand shipchandler. Mais attention, comme bien souvent aux USA, les magasins ferment presque tous à 18h.
Bien que clôturée et gardée, on peut pénétrer dans l’Académie Navale, qui s’apparente plus à un campus universitaire qu’à une caserne.

Annapolis
A Annapolis

Nous profitons de notre escale à Annapolis pour faire une escapade d’une journée à Washington, qui n’est qu’à 40 km. Mais plutôt que de louer une voiture, nous choisissons d’y aller par car et métro. Balade autour de la Maison Blanche, et dans les parcs avoisinants, visite du monument dédié à George Washington, promenade sur le Mall vers le Capitole... Le quartier est aéré et verdoyant, on comprend que le président et les membres du gouvernement préfèrent vivre ici plutôt qu’à New York...
Nous visitons ensuite le musée de l’air et de l’espace, très spectaculaire, et nous rentrons, toujours par métro et car, à Annapolis, où nous faisons quelques courses avant de retrouver MILLIVORE sur son corps mort. Nous sommes crevés, mais Sweet qui est resté à bord toute la journée, est lui
en pleine forme, et nous le descendons à terre pour une grande balade.
Annapolis sera notre escale la plus au nord de la Chesapeake Bay, nous n’avons pas le temps de pousser jusqu’à Baltimore, et nous repartons vers Norfolk.

Washington
Jardin proche de la Maison Blanche à Whashington DC

ET RETOUR A NORFOLK  (VIRGINIE)
Nous quittons Annapolis avec l’intention de faire une escale d’une nuit dans Patuxent River, mais la météo nous annonce du vent de sud-ouest fort pour bientôt, et nous décidons de faire route directe sur Norfolk, à 24 heures de mer au sud. Notez-bien que nous avions du nordet il y a huit  jours pour aller vers le nord. Aux USA, c’est comme en Bretagne : on a toujours le vent dans le nez !...

Le lendemain, nous arrivons à Little Creek, où nous avons déjà fait escale. C’est ici que nous préparons MILLIVORE pour la grande traversée vers les Açores. Nettoyages, rangements, lavage, vidange du moteur, avitaillement et achats divers, contrôle de l’accastillage et du gréement... Tout ça nous occupe une semaine entière.

Comme nous avons loué une voiture, nous allons aussi visiter la région, et nous franchissons juste pour le plaisir le pont-tunnel qui barre l’entrée de la Chesapeake Bay : un ouvrage d’art de 25 km de long (si, si !), comportant trois ponts et deux tunnels, le passage des ponts aux tunnels se faisant sur 4 îles artificielles. Les tunnels, sous les chenaux d’accès à la Chesapeake Bay permettent aux navires même de fort tonnage, d’entrer et sortir librement dans la baie.
Un couple d’Américains sympathiques, possédant un petit bateau à moteur sur notre ponton, nous amènent un soir dîner à Norfolk, et visiter le centre-ville.

Sweet
Dernière galopade avant 19 jours de mer

Et le 30 mai 99, après un dernier plein de gasoil, nous larguons les amarres. En route pour Flores,
aux Açores, à 2100 milles de Norfolk.               


Annexe : Et la gastronomie, dans tout ça ?...
                               
Par Françoise
Juillet 99


Yves, rencontré aux Açores, nous a fait remarquer, à juste titre que dans nos compte-rendus, nous n’avions pas du tout parlé de nourriture et des spécialités locales. Il est vrai que ce n’était pas notre but premier pour ce voyage...
Mais nous avons quand même découvert quelques saveurs nouvelles ou oubliées...

La Galice
Toutes les spécialités espagnoles bien connues : paëlla, tapas, poissons, grosses moules, etc...Je vous signale une crêperie bretonne à La Corogne ! (sur le port de pêche “Crêperie de Bretagne”). En fait on y mange d’excellentes crêpes espagnoles (et non bretonnes !).
A Camarinas, on trouve dans la petite boulangerie du bourg (près de la pharmacie) de l’excellent pain, des croissants et de l’empenada (sorte de tourte à la morue).

Le Portugal
Beaucoup de poissons. A Peniche, ne pas rater les sardines grillées.
Les pâtisseries portugaises sont très sucrées. Il faut goûter les petites tartes, genre flan pâtissier, et la brioche à la cannelle.
Il faut bien sûr acheter du Porto (excellent et moins cher qu’en France), mais aussi du Muscat de Setubal. Le Mateus est un grand vin portugais dans une drôle de petite bouteille. L’huile d’olive “Gallo” de V. Guedes est très bonne.

Madère
Redécouvrir le Madère (qui n’a rien à voir avec celui vendu en France pour les sauces). Nous avons une préférence pour le “doce”. Goûter aussi les petites brochettes de boeuf ou de poisson. Au Portugal et à Madère, les supermarchés Pingo Doce offrent un bon rapport qualité/prix. Il vaut mieux y acheter les vins que d’aller chez un caviste...

Les Canaries
Attention !  Aux Canaries on trouve de bonnes spécialités espagnoles, mais il faut bien chercher ! Car c’est plutôt une nourriture internationale... à tendance germanique ! A Lanzarote, il faut acheter du vin. Chaque pied de vigne est planté dans la cendre volcanique et entouré d’un muret (les alizés soufflent parfois fort ici).
Le fromage de chèvre est très bon sur Fuerteventura.
A Tenerife, nous avons très bien mangé dans les petits restaurants qui sont installés dans la zone piétonne de Los Cristianos (près de la plage et du port). A l’apéritif, prendre un Martini Rose, servi avec des glaçons et de l’orange dans un grand verre.
A La Gomera, ne pas rater le marché (mercredi et samedi) pour les légumes et les fruits. Nous avons fini de manger les pommes de terre de La Gomera aux Grenadines, 2 mois plus tard... Il faut penser à bien laver fruits et légumes (sauf les carottes, à brosser) avant de les embarquer, pour éliminer les oeufs de cafards. C’est amusant d’aller dans la marina un jour de marché fin novembre ou en décembre : les ponts des bateaux sont couverts de fruits et légumes qui sèchent... A La Gomera, on trouve aussi d’excellents fromages, vache et chèvre. Ils se sont bien conservés pendant un mois, nous en avons mangé jusqu’à La Barbade.

Les Antilles
Beaucoup de spécialités créoles ! Aux Grenadines, tout est cher car tout (ou presque) est importé. Mais le poisson, la langouste, les fruits sont apportés directement à bord. Dans certains mouillages, les “comités d’accueil” sont un peu “collants”. Il vaut mieux se mettre d’accord avec un gars, et ne commercer qu’avec lui, en précisant aux autres qu’on s’est entendu avec “Goldfinger”, par exemple (ils ont tous des noms ronflants !...).
A St Elizabeth (Bequia) et à Clifton (Union), on trouve un peu de tout. L’eau est payante, on peut faire le plein à la marina (Clifton), ou bien une barge avec citerne vient accoster le bateau au mouillage (Bequia).
Dans les îles françaises, il faut absolument goûter le boudin créole, le colombo (de poulet ou de mouton), le gratin de cristofine, le blaff (sorte de pot-au-feu de poisson), les lambis, un peu caoutchouteux, les bananes (fruits ou légumes), les ananas, etc... Il faut aussi goûter les différents cafés aux parfums bien prononcés (Martinique, Dominique, Guadeloupe). Et il faut aussi faire le plein d’épices sur les marchés. A Ste Anne, en Martinique, il y a un petit marché très agréable. Celui de Basse Terre, en Guadeloupe est très coloré.
Et le rhum ? A ne pas rater... Il est excellent et bien moins cher qu’en métropole ! Le rhum de La Barbade est très bon (nous en rachèterons aux USA...). En Martinique et en Guadeloupe, il y a beaucoup de marques, certaines plus connues que d’autres. Tout est question de goût... En Martinique, nous avons préféré celui de trois Rivières, et en Guadeloupe celui de Montebello.
Quant aux restaurants, tout est question de goût, de budget, etc... je vous signalerai quand même celui du Boatyard à La Barbade, avec vue superbe sur le mouillage. Au Marin, l’Indigo, avec orchestre le vendredi soir (on danse le zouc dans une ambiance très décontractée !...). Et la pizzeria et les petits restaus bordant la marina de Rivière Sens.
A Puerto Rico, dans le vieux San Juan, plusieurs restaurants offrent de la nourriture hispano-américaine assez dépaysante. Le café local est à découvrir.

Les Bahamas
Pas vraiment de spécialités aux Bahamas ! Et peu de possibilités de faire des courses, en particulier dans les Exumas. A Clarence Town, sur Long Island, il y a une coopérative où l’on trouve des fruits et légumes excellents à bas prix, et une petite épicerie avec quelques produits de base. A Georgetown, c’est le grand luxe ! Avec Exuma Market, un vrai petit supermarché où l’on trouve de tout, y compris de la viande (des USA) et du poisson congelés. A Staniel Cay, toute petite épicerie (maison bleue), et ce qui est appelé supermarket (maison rose, juste un peu plus grande).
Toujours à Staniel Cay, il y a un excellent restaurant, Happy People, où l’on peut manger de la langouste grillée pour 50F. Quand on trouve de l’home bread, il ne faut pas hésiter à en acheter, même si c’est cher ! C’est bien meilleur que le pain de mie américain (à Georgetown Mom’s bakery sur le terre plein de la marina, à Staniel cay à la maison rose). Aux Bahamas, il y a aussi du rhum, le Don Lorenzo étant le plus célèbre. Le rhum à l’ananas est agréable au goût, sur quelques morceaux de glace, celui à la mangue est plus écoeurant.

Les USA
Alors là, pour nos papilles françaises, c’est la Bérézina !
La nourriture est aseptisée, insipide, trop sucrée ! Nous avons essayé plusieurs fromages, mais il ont tous le même goût ! (On trouve du fromage français dans certaines épiceries, mais il est hors de prix !). Par contre, ils ne lésinent pas sur les colorants ! Presque tous leurs yaourts sont à base de gélatine, et non de ferments lactiques. Leur viande est bonne, mais on la sait bourrée d’hormones. Le poissons est bon et généralement bien cuisiné dans les restaurants. Quant aux vins californiens, ils ne sont pas mauvais, mais le Champagne, par exemple, ne vaut pas un bon Champagne français.
Les fruits et légumes sont superbes à l’étalage, mais comme tout, ils n’ont pas de goût ! Les pommes, les tomates sont belles, toutes brillantes, mais on ne sait pas trop ce qu’on mange ! Le chou-fleur est sucré, comme certaines carottes (manipulations génétiques ?), et nous avons été obligés de jeter au milieu de l’Atlantique, les pommes de terre achetées à Norfolk juste avant le départ. Elles étaient toutes pourries !

Chaînes de supermarchés (bon rapport qualité/prix) :
Floride, Georgie :  Publix
Virginie, Maryland :     Food Lion

Chaînes de restaurants :
Denny’s et Apple Bee : repas simples, bon marché, mais de bonne qualité.
Dans l’ensemble, les steak houses (souvent buffet de hors d’oeuvre, puis viande).
A noter :      bien cuit :    well done
                         rosé :       medium
                         bleu :       rare
Et tous les restaurants de poissons.
La plupart du temps, pour les boissons sans alcool, le refill est gratuit (Coca, Seven Up, thé froid ou chaud, café, etc...). Le café, dans les restaurants aux Etats-Unis, n’est vraiment pas fort. Pour nous c’est plutôt de l’erzatz de café ! (et ça a la couleur du thé bien infusé !). L’avantage est qu’on peut en boire tant qu’on veut, ça n’empêche pas de dormir...
Nous avons quand même apprécié quelques spécialités :
    Le lemon pie en Floride (tarte au fromage blanc et citron vert)
    La tarte au pecan, un peu plus haut en Caroline
    Le crabe cake, spécialité de la Chesapeake bay.

Globalement, en conclusion, il ne faut pas aller aux USA pour la nourriture (et pourtant, comme en France, nous avons évité les Mac Do !...). Et il faut savoir que bien se nourrir aux USA (selon nos critères français) revient cher ! Donc, prévoir le budget.

Les Açores
Après les USA, quelle joie d’arriver aux Açores ! Enfin du vrai pain, du vrai fromage, et du bon beurre !... Chaque île, ou presque, a sa spécialité de fromage, les plus connus étant ceux de Pico, de Sao Jorge et de Sao Miguel. Chaque île a aussi son vin cuit (celui de Terceira est particulièrement bon), que l’on déguste en grignotant des fèves séchées et salées. La viande est bonne et pas chère. Les supermarchés Modelo ont un assez bon choix de produits (y compris quelques produits français, qui font parfois du bien après des mois loin de la France !).

Remarques
J’ai oublié la plupart des noms des restaurants où nous avons mangé, car je ne les ai pas notés aussitôt. Vous ne serez peut-être pas d’accord avec mes appréciations, mais la nourriture est quelque chose de très personnel et nos goûts sont tous différents...

Quelques trucs utiles :
- Pour conserver les oeufs :
Nous mettons 6 oeufs dans le panier de la cocotte minute, nous les plongeons 5secondes      dans l’eau bouillante (ça coagule une mince couche de blanc), et nous les remettons dans  leur boîte en carton, à l’abri de la lumière. Ils se conservent ainsi plusieurs semaines en dehors du frigo.

- Le lait condensé remplace la crème fraîche dans les recettes cuisinées.

- Le lait UHT est encombrant et souvent cher, par contre on trouve partout facilement du lait en poudre. Comme nous ne buvons pas de lait pur, nous l’avons adopté à partir du Portugal, jusqu’au retour en France. Nous reconstituons du lait liquide pour les desserts et la purée.

- En grande traversée, penser à utiliser l’eau de mer pour la cuisson du riz, des pâtes, de la semoule de couscous (2/3 d’eau douce, 1/3 d’eau de mer). Pour les pommes de terre avec leur peau, tout à l’eau de mer.

- Le jambon en boîte (souvent de marque danoise) est très pratique pour les salades composées, les risotto, les pâtes (on peut réaliser d’excellents spaghetti bolognaises avec).

- Les briques individuelles de soupe et les conserves de plats cuisinés pour une personne sont indispensables. Il ne faut pas hésiter à prévoir large... En cas de mauvais temps, le mal de mer ne frappe pas tout le monde en même temps (heureusement !). Et il est bien agréable de pouvoir manger chaud...

- Il faut savoir que rien n’égale les conserves françaises, donc prendre ses précautions pour les grandes traversées (en métropole avant le départ, dans les îles françaises ensuite).

- Aux USA, on ne trouve pas de biscottes ni de pain de mie longue-conservation. Donc pour la traversée-retour, j’ai été obligée de faire du pain tous les deux jours à peu près. Pas agréable au près serré dans la mer formée...!

- A bord de Millivore, il y a un four mais j’ai renoncé à l’utiliser (à cause de sa consommation élevée en gaz et de la chaleur ). Toute les recettes sont facilement réalisables à la cocotte-minute ou à la poêle. Il n’y a que pour les tartes que j’ai baissé les bras !

- Et pour finir, ma recette de “pain à la casserole“ :

Ingrédients :
- 500g de farine
- 1 sachet de levure de boulanger (ou 3 cuillerées à café)
- 2 verres d’eau tiède
- 1 cuillerée à café (bombée) de sel

Travailler la pâte jusqu’à ce qu’elle se détache bien du saladier. Couvrir avec un torchon et laisser reposer une heure. Retravailler alors la pâte pendant 10 minutes. Beurrer une casserole (genre Téfal). Y mettre la pâte. Couvrir avec le torchon et laisser gonfler. Là, le temps dépend de la température ambiante : 1 heure sous les tropiques, 3 à 4 heures aux Açores.
Quand la pâte a bien gonflé, faire cuire à feu très doux, en mettant un couvercle sur la casserole, pendant 45 minutes. Retourner la boule à l’aide du couvercle et poursuivre la cuisson pendant 15 minutes.


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ESCALES AUX ACORES

Septembre 99



30 mai 1999. Nous quittons Norfolk, en Virginie, pour la traversée retour, vers les Açores. La route orthodromique nous ferait monter assez rapidement au nord, vers le 40ème degré, et c’est aussi ce que conseillent tous les bouquins, pour profiter du Gulf Stream et des vents d’ouest. Mais dès le départ, une dépression basse en latitude nous fait craindre des vents contraires sur cette route, et nous partons plein est. Quelques jours plus tard, nous restons une dizaine d’heures dans la veine principale du Gulf Stream, ce qui nous vaut une journée de près de 200 milles (155 milles sur l’eau). Nous pensions remonter au nord une fois la dépression évacuée, mais non... Un puissant anticyclone, venu du Canada vient se placer sur le nord de l’Atlantique, et arrive à inverser totalement la circulation atmosphérique sur l’océan : vents puissants d’est sur le nord (où circule normalement le flux d’ouest), dépression sur les Açores (si, si !), et vents d’ouest plus au sud. Heureusement, nous recevons à bord les cartes météo quotidiennes, ce qui nous permet de rester dans ce flux d’ouest, mais qui nous oblige à descendre en latitude jusqu’au 34ème degré (où nous devrions avoir l’Alizé de nord-est...). Finalement, il nous faut bien remonter au nord (ou bien repartir vers les Canaries...), et nous finissons la traversée par 8 jours de près dans la brise. Epuisant...

Coucher de soleil
Coucher de soleil sur l'Atlantique nord

19 jours de traversée de Norfolk à Flores, ce n’est pas si mal car les bateaux qui sont restés sur la route nord ont tout fait au près, et n’ont pas fait de grosses moyennes. Notamment un ketch français de 18m a traversé en 18 jours, mais depuis les Bermudes, soit 600 milles de moins. Vive les fax météo !... 


FLORES
Nous approchons de Flores, l’île la plus à l’ouest des Açores, au près serré, par vent d’est soutenu. L’alternateur d’hélice ayant grillé aux USA, nous avons fait tourner le moteur chaque jour pour recharger les batteries, et nous n’avons plus beaucoup de gasoil.

Il n’y a que deux ports à Flores, et les deux sont ouverts à l’est. Santa Cruz, minuscule, est totalement intenable par vent d’est. Il ne reste que Lajes, mais qui doit être terriblement houleux par ce vent. Nous pensons y rester juste le temps de faire les formalités d’entrée et de prendre du gasoil, puis aller mouiller ensuite sous le vent de l’île.
Comme nous arrivons en début de nuit, nous allons prendre la cape sous le vent de l’île pour la nuit, et le 19 juin au petit jour, nous partons sous grand voile et moteur pour les quelques milles qui nous séparent de Lajes. Le vent est toujours fort, et dès que nous quittons l’abri de l’île, les mouvements sont tels que le circuit de gasoil se désamorce, et le moteur cale. Il reste pourtant plus de 15 litres dans le réservoir, mais dans un coup de roulis, la prise de gasoil s’est trouvée à l’air libre, et c’est la panne.
Décidément, nous n’irons pas à Lajes !
Nous repartons à la voile sous le vent de l’île, et nous allons mouiller à Faja Grande, petit village bordé d’une plage de galets. Nous sommes seuls, mouillés au pied d’une falaise de 300 mètres, d’où tombent plusieurs cascades. C’est très beau !  De plus l’abri est très bon, avec ce vent d’est. Nous sommes même protégés au sud par une coulée de lave noire, et le mouillage est parfaitement calme, sans houle ni clapot. Je descends à terre en annexe, avec Sweet qui attendait ça avec impatience. Le village de Faja Grande est très petit, et n’offre aucune ressource, mais je suis très vite confronté à l’accueil portugais : en moins de 10 minutes, et sans parler un mot de la langue locale, j’ai trouvé quelqu’un qui va m’emmener à Santa Cruz en voiture, avec mes bidons, pour faire les formalités et ramener du gasoil !  Je profite de ce passage à Santa Cruz pour aller voir le port. Le petit bassin est bien agité, et la mer déferle sur les roches de l’entrée. Rien à faire, il est vraiment inaccessible par vent d’est. Ressources de base dans le village.
L’île est très belle, couverte de fleurs (qui lui ont donné son nom), avec plusieurs beaux lacs dans des cratères volcaniques. Faja Grande est le village le plus à l’ouest de l’Europe. Deux jours après, plusieurs bateaux nous ont rejoints à Faja Grande, et José, un pêcheur du coin, nous amène à Lajes dans son pick-up, pour faire des courses. Nous y rencontrons d’autres équipages français, américains, canadiens, et nous déjeunons tous ensemble dans un petit restaurant. Il y a plus de 50cm de creux dans le port de Lajes, et le séjour au mouillage est invivable. Aucun regret de n’être pas venus ici ! Nous conseillons à tous de venir nous rejoindre à Faja Grande, ce que plusieurs feront. De retour à Faja Grande, nous trouvons au mouillage le BEL ESPOIR, avec le père Jaouen à bord, qui arrive de Saint Pierre. Et nous finissons la journée par un barbecue sur le port, avec les autres équipages.

Pour résumer sur Flores :
               Santa Cruz :   port de beau temps, par vent d’ouest établi, assez précaire.
               Lajes :        bon abri par vent de sud au nord, par l’ouest, intenable par vent d’est.
               Faja grande :  bon mouillage par vent d’est établi.
Et quelques mouillages plus ou moins précaires sur la côte est, par vent d’ouest établi.

Au mouillage à Faja Grande
Au mouillage à Faja Grande

HORTA (FAIAL)

Après 4 jours de repos dans le mouillage enchanteur de Faja Grande, le vent d’est tombe enfin, et nous partons pour Faial, route au moteur par vent très faible.
Horta, port principal de l’île est un haut lieu de la plaisance internationale. C’est là que tous les bateaux de voyage passent, un jour ou l’autre. C’est d’ailleurs une des seules villes du monde qui reçoit plus de touristes en bateau de plaisance qu’en avion...
Nous arrivons en fin de matinée, après une nuit de mer calme. Accueil au port très bien organisé, on voit qu’ils ont l’habitude d’accueillir les voiliers. “Vous allez vous mettre à couple sur tel bateau, en cinquième position... Ah, vous avez un chien à bord ? A couple, ce n’est pas pratique... Bon, je vais vous trouver une place sur un ponton !” Merci, Sweet ! Et merci surtout au personnel du port, qui fait vraiment tout son possible pour aider les équipages en escale ! La marina est très bien abritée, et équipée de pontons à catways, avec eau et électricité. Quand ils sont pleins, les bateaux se mettent à couple le long d’un grand mur. Pas de problème d’amarrage, le marnage est faible. Au gré de la météo, le port se vide (vent d’ouest) ou se remplit (vent d’est) parfois jusqu’à bloquer tous les mouvements. Mais personne n’est laissé dehors, rien à voir avec Funchal...

Nous avons le plaisir de retrouver ici nos amis de l’ECHAPPEE BELLE, que nous n’avions pas vus depuis la Dominique, et CHRYSALIDE, connu aux Bahamas, qui arrive quelques heures après nous, mais nous avons raté QUINTUS de peu, ils sont partis deux jours avant notre arrivée... Et nous allons bientôt voir arriver aussi tous nos nouveaux amis connus à Flores.
Nous allons chercher notre courrier au célèbre café “Chez Peter”, qui assure un service postal gratuit, et fiable. Ce café est tout petit, peu en rapport avec sa réputation quasi mondiale dans le domaine de la voile.
L’ambiance est très bonne dans le port, entre les équipages de toutes nationalités. Les Européens rentrent au bercail, les Américains viennent de partir, et s’inquiètent d’aborder l’Europe (électricité 220V, pas de remplissage des bouteilles de propane, des tas de dialectes incompréhensibles, télé
PAL-SECAM... Quelle jungle !...).

Principales activités à Horta, longues discussions entre équipages autour d’un “planteur” (prévoir une bonne cargaison de rhum !), et surtout, peinture du logo du bateau sur l’un des murs du port. Horta est célèbre pour ça, des dizaines de milliers (non, non, je n’exagère pas !) de dessins couvrent tous les murs en béton du port, et même aussi le sol. Il n’y a plus de place disponible depuis bien longtemps, et donc on recouvre les dessins les plus anciens qui sont devenus illisibles. Pas question de ne pas laisser son dessin, ça porte malheur ! On se passe les pots de peinture d’un bateau à l’autre, avec réservations plusieurs jours à l’avance ! Cette coutume sympathique fait la fortune de la droguerie locale, qui fournit la peinture, et donne un environnement très coloré au port. Rien à voir avec les tags de nos banlieues, car chaque équipage a à coeur de faire un joli dessin bien propre. Et pour une bonne longévité, on peut vernir le dessin avec un vernis incolore, car chacun espère bien retrouver son dessin “quand on reviendra”...

Notre logo
Notre logo, sur un mur du port de Horta

Il faut aussi faire quelques courses, le supermarché est assez loin du port, mais comme on y rencontre toujours d’autres équipages, il est fréquent de fréter un taxi à plusieurs pour le retour. Pour le linge, la camionnette de la laverie passe le prendre sur le port, et le ramène quelques jours plus tard. Il y a bien un lave-linge disponible sur le port, mais il y a tous les jours une queue monstrueuse. On trouve un accès Internet à Cyber Açores, pour lire les E-mail. Nous louons une voiture une journée, pour faire le tour de l’île. Très jolie, avec son volcan, et couverte de fleurs, comme Flores.
Nous pensions passer 4 ou 5 jours à HORTA, et nous sommes restés 10 jours dans cette sympathique escale, sans jamais nous ennuyer.

Faial
Caldeira do Inferno, sur Faial : deux cratères de volcans submergés

VELAS (SAO JORGE)

Nous quittons Horta par vent d’ouest, mais quelques heures après, il passe au sud-est. Et le port de Velas, seul port de l’île de Sao Jorge est justement ouvert au sud-est... Ce tout petit port de pêche a fait récemment de gros effort pour accueillir les plaisanciers, et a mis en place de nombreux corps morts. C’est très clapoteux avec ce vent de sud-est, mais ça ne semble pas dangereux, et nous restons quand même pour la nuit. Mais nous ne descendons pas à terre. Dommage, car il paraît que le village et l’île sont jolis...


PRAIA DA VITTORIA (TERCEIRA)
La météo n’est pas engageante pour les prochains jours, et nous renonçons à aller à Graciosa, où il n’y a pas d’abri sérieux. Nous partons donc directement pour Praia da Vittoria, sur Terceira.
Deux grandes jetées ont été construites pour fermer une grande baie, et forment un immense espace abrité. Le vent étant au sud, nous allons dans la partie sud, où se trouve un port de pêche et commerce tout neuf, et qui semble encore en grande partie inutilisé. Nous mouillons à l’extérieur, mais plusieurs voiliers sont entrés dans ce port et sont à quai, où il y a toute la place voulue. Inconvénient : nous sommes loin de la ville qui est au nord de la baie, mais comme l’eau est plate, nous y allons en annexe.
Les formalités se font au port du village, tout au nord de la baie, où une petite marina est en construction. Le village est agréable, avec une grande rue commerçante très animée, et beaucoup de magasins de souvenirs. Il y a une base de l’OTAN sur Terceira, et beaucoup d’Américains passent par ici. Il y a d’ailleurs un gros trafic d’avions militaires sur l’aéroport proche. Au bout de 2 jours, le vent passe au nord, et nous allons mouiller tout au nord de la baie, près du village. Quelques jours de repos en attendant que la météo s’améliore, et nous partons en fin d’après midi pour Sao Jorge, à 100 milles au sud est.

Terceira
Au mouillage à Praia da Vittoria

PONTA DELGADA (SAO MIGUEL)
Nous arrivons le lendemain matin à Ponta Delgada, la plus grande ville des Açores, sur la plus grande île. Longues formalités, car il y a la queue, et comme il n’y a plus de place au ponton, nous sommes à couple en troisième position. La marina est moderne, eau, électricité, et parfaitement abritée. Nous retrouvons quelques amis-bateaux, et comme nous voyons flotter le guidon UPF sur ISIS, nous faisons la connaissance de son équipage, Yves et Aline Pinault et Antoine Paquignon, avec qui nous fêterons dignement le 14 juillet !
On trouve toutes les ressources d’une grande ville à Ponta Delgada, grands magasins, plusieurs supermarchés dont un tout proche de la marina. Parfait pour préparer le bateau pour la traversée finale vers la France.
Nous louons une voiture pour visiter l’île. Nous payons cher, mais ça vaut le coup. L’activité volcanique est encore très présente sur cette île, et on y trouve à plusieurs endroits des fumerolles et des geysers d’eau bouillante, avec odeurs prononcées de soufre... Fleurs à profusion, lacs dans les cratères, littoral découpé, une bien agréable promenade.

Sao Miguel
Sao Miguel

ET RETOUR EN BRETAGNE
Le 17 juillet 99, nous quittons les Açores pour la dernière traversée vers la Bretagne. Le créneau météo semblait correct au départ, mais après 3 jours de vent portant, un anticyclone vient se positionner au large de l’Irlande et y reste, produisant un fort flux de nord-est sur la zone. Impossible d’y échapper, de l’Irlande au sud du Portugal, le vent est au nord-est et souffle jusqu’au milieu de l’Atlantique...
Force 5 à 6, en plein dans le nez, mer creuse et courte, faible progression quotidienne, et pas d’amélioration en vue sur les prévisions météo à 4 jours... Au bout de 5 jours de ce régime, nous en avons vraiment assez, et nous décidons de nous dérouter vers la Corogne, en Espagne, accessible au près bon plein, sur un seul bord bien plus confortable.
C’est avec plaisir que nous arrivons à la Corogne après 10 jours de mer. Nous y sommes venus souvent et nous avons l’impression d’être “chez nous”. Une bonne nuit de sommeil, le plein de gasoil, et nous repartons dès le lendemain pour la dernière traversée vers la Trinité.
Traversée agréable, par vent faible, deux tiers de moteur, un tiers de voile petit largue, et le 31 juillet 99, à deux heures du matin, nous entrons à la Trinité sur Mer.


Et voilà, notre périple est terminé !

11 mois, 11900 milles, 100 escales différentes, 50 îles, 10 pays, 2 continents...

Une merveilleuse croisière !


Bilan de ce voyage


La durée
Pour ce voyage, nous n’avions qu’un an (année sabbatique), et nous avons limité la durée à 11 mois, pour avoir le temps de se réinstaller au retour.
11 mois, ça passe vite. Pour tenir l’itinéraire prévu nous avons dû courir (nous avons fait en moyenne plus de 1000 milles par mois !), et nous avons dû écourter certaines escales paradisiaques...
L’idéal est de partir plusieurs années, ce que nous ferons probablement à la retraite. On peut certainement passer 3 ou 4 ans à explorer les Caraïbes (du Venezuela à la Floride) sans jamais s’ennuyer. Il faut seulement passer la saison des cyclones au bon endroit, soit dans l’extrême sud, où ils sont rares, soit là où l’on trouve des mouillages ou des marinas parfaitement bien abrités (oui, oui, ça existe !)

L’itinéraire
Nous avons fait la plupart des escales classiques, mais nous sommes sortis des sentiers battus à plusieurs reprises :
Le sud du Portugal. Beaucoup de bateaux traversent directement de Lisbonne à Madère. Nous avons choisi de visiter d’abord le sud du Portugal et ne l’avons pas regretté. Sines, Lagos, sont de merveilleuses escales, si on peut oublier Vilamoura.
Lanzarote. A l’extrême est des Canaries, cette escale oblige à naviguer près du vent, depuis Madère. Elle est par conséquent plutôt fréquentée par les méditerranéens qui arrivent du Maroc. Peu touristique, et très dépaysante, avec son look saharien, elle mérite une visite. Au contraire, Grande Canarie et Tenerife, complètement bétonnées, sont à considérer comme des escales techniques (si on y trouve de la place...).
La Gomera est une bonne base pour préparer la grande traversée.
La Barbade. Si on ne s’y arrête pas en arrivant, on n’y retourne plus jamais (elle est à 100 milles au vent des autres Antilles). Ceux qui vont directement au Marin ou à Pointe à Pitre se privent d’une très agréable escale.
Les Vierges américaines. C’est vrai, il faut un visa US, et c’est pourquoi tout le monde va aux Vierges anglaises, où se trouvent aussi les bases de location. Mais c’est justement ce qui fait le charme des Vierges américaines : peu urbanisées, peu fréquentées, des conditions de navigation faciles (l’alizé y est nettement moins fort que plus au sud), et des dizaines de mouillages superbes... Nous regrettons de n’y être pas restés plus longtemps.
Porto Rico. À partir d’ici, nous quittons la route des européens, qui remontent directement des Vierges vers les Bermudes, et nous verrons essentiellement des bateaux américains et canadiens. Porto Rico et les îles proches sont pourtant très belles. Nous n’avons fait escale qu’à Culebra, Culebrita et San Juan, mais il paraît que la côte sud vaut aussi le détour...
Les Bahamas. Archipel de rêve... De loin ce que nous avons vu de plus beau durant ce voyage. Le tourisme et les flottes de location sont cantonnées au nord, sur Grand Bahama et Great Abaco. Les Exumas sont le domaine des plaisanciers américains qui naviguent (même pour eux, ça commence à être loin...), mais il y a tant de mouillages qu’on est jamais bousculés. Plus de 600 îles désertes, un climat agréable, des eaux d’une couleur et d’une clarté exceptionnelles... Et c’est si beau!... Et plus au sud,  il n’y a plus personne, on peut passer des journées entières seuls dans des mouillages de rêve...
Les USA. Totalement délaissés des plaisanciers français. Les mouillages tropicaux sont terminés (le climat aussi !), mais il y a quand même quelques jolis coins à voir, St Augustine, Savannah, Charleston... La navigation sur l’Intracoastal Waterway est parfois lassante, mais souvent pittoresque. La Chesapeake Bay, un Golfe du Morbihan à l’échelle 20, propose des dizaines de très beaux mouillages sauvages, et plusieurs jolies villes, Saint Michael, Annapolis...
Les Açores. Beaucoup de bateaux se contentent de l’escale classique de Horta. Bien sûr, il faut aller à Horta, ne serait-ce que pour peindre son logo sur le mur... Mais les autres îles méritent aussi largement quelques jours d’escale.

Les traversées
Plus éprouvantes que ce qu’on pouvait imaginer. A l’aller, 15 jours consécutifs avec 20 à 30 noeuds de vent établis, et tous les jours des grains bien plus forts, avec une mer creuse, courte et croisée. Mais c’était portant...
Au retour, nous avons eu du vent debout. Même s’il a rarement dépassé 25 noeuds, il nous a donné des conditions de navigation très pénibles. Ne croyez pas les bouquins ! Non, il n’y a pas toujours du petit temps dans la mer des Sargasses... Non, le vent n’est pas toujours de secteur ouest sur l’Atlantique nord... Non, il n’y a pas toujours un anticyclone sur les Açores... Cette année (1999), nous avons eu entre mai et juillet des semaines entières de vent d’est établi sur tout l’Atlantique nord... Ne vous fiez pas aux statistiques, et emportez un décodeur de fax météo !

Le bateau
MILLIVORE est un FEELING 1090, acheté neuf en 1992, mais sans barre à roue ni circuit 220V comme spécifié à la commande. Il a parfaitement tenu le coup pendant cette croisière, et n’a connu aucune avarie, malgré des conditions parfois éprouvantes (pour lui comme pour nous...), journées entières de près serré dans la brise. Une préparation minutieuse, et notre parfaite connaissance de ce bateau (nous avions parcouru près de 10000 milles à bord, avant de partir), ont certainement contribué à cette absence de problème.
Ses équipements “grande croisière” comprennent, entre autres :
Un pilote in-board (vérin hydraulique sur la mèche de safran), et un pilote de barre franche de secours.
Trois panneaux solaires, une éolienne et un alternateur d’hélice.
Deux retenues de bôme, une sur chaque bord, gréees en permanence et ramenées au cockpit.
Une mâchoire de tangon spécialement polie pour réduire le raguage de l’écoute de foc.
Une station de radioamateur, et un PC portable permettant la réception des fax météos et des messages NAVTEX.
Au retour, avec près de 22000 milles au loch en moins de 8 ans, MILLIVORE est encore “comme neuf”. Seul son génois est à bout de souffle, et nous allons lui en offrir un neuf pour la prochaine saison.

L’équipage
Nous naviguons en couple, depuis plus de vingt ans. Et nous avons fait ce voyage également à  deux. Nous avons cependant embarqué des membres de la famille et des amis, aux Antilles, aux Bahamas et aux USA, mais plus comme passagers que comme équipiers.

Un chien à bord
Quand nous sommes partis, notre chien Sweet avait 5 ans, et naviguait avec nous depuis l’age de 6 mois : un vrai chien de mer ! Exubérant avec les visiteurs, il est plus calme avec nous, et ne nous a pas posé de problème. En mer, il fait ses besoins sur le pont si le temps est calme (il y a pour ça des filets de filière à l’avant, sur MILLIVORE) ou dans le cockpit quand ça remue, sur un tapis antidérapant réservé à cet usage. Un tuyau branché sur la pompe d’eau de mer de la cuisine nous permet de rincer immédiatement (je ne puise jamais d’eau de mer au seau, en navigation, c’est une des manoeuvres les plus dangereuses que je connaisse...). Mais bien sûr, il préfère aller à terre, et nous le descendions en général au moins deux fois par jour, en escale.
Les chiens sont interdits sur les territoires britanniques, et nous ne sommes pas allés pour ça aux Vierges Anglaises, ni aux Bermudes. Dans les anciennes colonies britanniques, devenues pays indépendants, les chiens sont parfois interdits aussi, mais cette réglementation ne semble pas appliquée en pratique, et nous n’avons eu aucun problème. Partout ailleurs les chiens sont acceptés, et on ne nous a demandé le certificat antirabique de Sweet qu’une fois, aux Vierges américaines. Il avait bien sûr tous ses vaccins à jour, et aux Antilles, nous avons lui administré de plus un vermifuge contre les “vers du coeur”, parasites tropicaux qui n’existent pas en Europe. Sweet n’a connu aucun problème de santé durant ce voyage.
Outre le plaisir de sa compagnie, un chien à bord est aussi une bonne protection contre les visiteurs indésirables, et contre les comités d’accueil trop envahissants des petites Antilles.

Les finances
Nous avons vécu 11 mois, avec un budget de 5000F par mois, y compris les places de port, les voitures de location, les restaurants et autres petits plaisirs... Et les marinas américaines, qui sont très chères...
Il faut bien sûr ajouter l’équipement du bateau. Mais la vie à bord revient beaucoup moins cher que la vie à terre. Ca ne vaut pas le coup de s’en priver !...

Et si c’était à refaire ?
C’est bien simple, nous commençons à penser à notre prochain voyage...